Site archéologique de Volubilis

Brève description

 

La capitale de la Maurétanie, fondée au IIIe siècle av. J.-C., fut un avant-poste important de l’Empire romain et a été ornée de nombreux beaux monuments. Il en subsiste d’importants vestiges dans le site archéologique, situé dans une région agricole fertile. La ville devait devenir plus tard, pendant une brève période, la capitale d’Idriss Ie r , fondateur de la dynastie des Idrissides, enterré non loin de là, à Moulay Idriss.

Basilique et Capitole © Barbara Blanchard Plus d’images …

Valeur universelle exceptionnelle

 

Brève synthèse

Volubilis renferme les vestiges essentiellement romains d’un municipe fortifié bâti sur un site imposant au pied du Djebel Zerhoun. Sa superficie atteint 42 hectares. Elle est d’une importance exceptionnelle en ce qu’elle montre le développement urbain et la romanisation aux frontières de l’empire romain et l’illustration graphique de l’interface entre les cultures romaine et indigène. Du fait de son isolement et qu’elle n’ait pas été occupée pendant près de mille ans, elle présente un niveau important d’authenticité. C’est l’un des sites les plus riches de cette période en Afrique du Nord, non seulement pour ses vestiges mais aussi pour la grande richesse de ses données épigraphiques.

Les vestiges archéologiques de ce site témoignent de plusieurs civilisations. Toutes les phases d’une occupation de dix siècles, de la préhistoire à la période islamique, sont représentées. Le site a livré une documentation artistique considérable qui inclut des mosaïques, des statues en marbre et en bronze et des centaines d’inscriptions. Ces documents et ceux qui restent à découvrir, représentent l’œuvre de l’esprit créateur des hommes qui ont occupé le site à travers les âges. Le périmètre du site est matérialisé par le rempart romain construit en 168-169 de notre ère. La physionomie du site révèle deux formes topographiques : une aire relativement plate et inclinée représentée par le quartier nord-est, le secteur monumental et une partie du secteur de l’arc de triomphe, où les Romains ont appliqué un urbanisme hypodamien orthogonal, et une aire accidentée représentée par les quartiers sud et ouest où ils ont suivi un schéma en terrasses. Les vestiges témoignent de diverses périodes à savoir la période maurétanienne où la ville faisait partie d’un royaume indépendant, la période romaine où elle était une métropole de la province romaine de la Maurétanie tingitane, une période surnommée « siècles obscures » avec à sa fin une phase chrétienne, et enfin une période islamique caractérisée par la mise en place de la dynastie des Idrissides.

Critère (ii) : Le site archéologique de Volubilis est un exemple exceptionnel d’une ville témoignant d’un échange d’influences depuis la Haute Antiquité jusqu’à l’arrivée de l’Islam. Ces échanges se sont croisés sur une aire citadine correspondant au périmètre du site, et sur une aire rurale étendue entre les rides prérifaines du Zerhoun et la plaine du Gharb. Ces influences témoignent de cultures méditerranéenne, libyque et maure, punique, romaine et arabo-islamique ainsi que des cultures africaine et chrétienne. Elles se traduisent par l’évolution urbaine de la ville, les modes de construction et de décoration architecturales, et la création de paysages.

Critère (iii) : Ce site est un exemple exceptionnel d’ensemble archéologique et architectural et d’un paysage culturel apportant un témoignage sur plusieurs cultures (libyco-berbère et maurétanienne, romaine, chrétienne et arabo-islamique) dont plusieurs sont disparues.

Critère (iv) : Le site archéologique de Volubilis est un exemple exceptionnel d’un foyer de différentes formes d’immigration, de traditions culturelles et de cultures disparues (libyco-berbère et maurétanienne, romaine, chrétienne et arabo-islamique) depuis la Haute Antiquité jusqu’à l’arrivée de l’Islam.

Critère (vi) : Le site archéologique de Volubilis est chargé d’histoire, d’événements, d’idées, de croyances et d’œuvres artistiques d’une signification universelle, notamment en tant que lieu qui abrita pour une brève période la capitale de la dynastie musulmane des Idrissides. La ville de Moulay Idriss Zerhoun toute proche du site abrite le tombeau de ce fondateur qui fait l’objet d’un pèlerinage annuel.

Intégrité (2009)

La zone tampon (décision 32 COM 8B.55) et les limites du site (décision 32 COM 8D) ont été clarifiées et approuvées par le Comité du patrimoine mondial en 2008. Les limites du bien comprennent tous les éléments conservés qui appartenaient à la ville fortifiée et ses bâtiments extérieurs.

L’abandon de la ville depuis des siècles a assuré à ses ruines d’excellentes conditions de conservation. Ces dernières devraient faire l’objet de programmes de conservation sur le long terme pour préserver leur authenticité.

Authenticité (2009)

Volubilis se distingue par sa conception urbaine (plan hypodamien et plan en terrasses), son exécution selon des normes architecturales et défensives bien définies, ses matériaux de construction présentant divers faciès géologiques, ses composantes relatant une richesse d’équipements citadins, autant d’attributs toujours visibles. Elle se caractérise aussi par son intégration dans un paysage naturel intact et dans un environnement culturel original.

Besoins en matière de protection et de gestion (2009)

Les mesures de protection relèvent essentiellement des différentes lois de classement des monuments historiques et des sites, particulièrement la loi 22-80 (1981) relative à la conservation du patrimoine marocain. La gestion du site se base sur un plan d’action s’appuyant lui-même sur un dispositif juridique national et international ainsi que sur la stratégie du Ministère de la Culture et les décisions du Comité du patrimoine mondial. Cette gestion porte sur la conservation, la conservation préventive, la fouille, l’entretien, la sécurité, la restauration, la mise en valeur du site et la préservation de sa zone de protection. Le plan de gestion est en cours d’élaboration par la Conservation du site de Volubilis, responsable de la gestion du site. L’adoption de la zone de protection, l’établissement du titre foncier de la propriété, la préparation du plan cadastral et le projet d’aménagement en cours d’élaboration par le Ministère de Culture, constituent les éléments de base de ce document. Le plan de gestion devra traiter toutes les nouvelles interventions sur le site.

Description longue

[Uniquement en anglais]

Volubilis is an exceptionally well-preserved example of a large Roman colonial town on the fringes of the empire. The archaeological remains of several civilizations are to be found there, representing all the phases of its 10 centuries of occupation, from prehistory continuously through to the Islamic period. Volubilis has produced a substantial amount of artistic material, including mosaics, marble and bronze statuary, and hundreds of inscriptions in situ .

The name of Volubilis is known both from ancient texts and from the abundant epigraphic material from the site itself. Its origin is unknown but may be a Latinized version of the Berber name for the oleander oualilt , which grows in profusion on the banks of Wadi Khoumane that runs round part of the site.

Its easily defensible location at the foot of the Jbel Zerhoun and the good soils of the plain, suitable for agriculture and the cultivation of fruit trees (especially olives), attracted settlers to the site of Volubilis at least as early as the 3rd century BC, as shown by a Punic inscription found in the town. By the time of the Mauritanian kingdom, whose capital was here from the 3rd century BC until AD 40, Volubilis already had a defensive wall. The town appears to have been laid out on a regular plan on the Punic-Hellenistic model.

The town developed along Roman lines during the reigns of Juba II and Ptolemy, when it may have been the capital. The Roman annexation of the Mauritanian kingdom in AD 40 led to the creation of two provinces; Volubilis was given the status of a municipium in one of these. It rapidly expanded to its maximum extent, with the construction of many public and private buildings, the latter associated with craft and industrial installations, most notably for the production of olive oil, the main product of the region. Epigraphic evidence points to the fact that the inhabitants of Volubilis during the Roman period were ethnically mixed, with Jews, Syrians and Spaniards living alongside the indigenous African population.

During the reigns of Roman emperors a town wall, with eight monumental gates, and a new monumental centre including a capitol and basilica, were constructed. The triumphal arch of Caracalla, which spans the decumanus maximus , is the point of articulation between the Punic-Hellenistic town and the extension in the Roman period to the north-east. At the beginning of the reign of Diocletian, in 285, the Romans abruptly abandoned southern Tingitana, for reasons that remain obscure, and Volubilis entered its ‘dark age’. The aqueduct that brought water to the town having been broken, the inhabitants moved to the west of the triumphal arch, where they built a new residential area near Wadi Khoumane. This was separated from the upper part of the town by a new defensive wall, which came down to the river bank. The area of the triumphal arch became the cemetery of this community. Four inscriptions dated to between 599 and 655 reveal that this was a Christian community with civic institutions still in place.

Documents and coins show that Volubilis had converted to Islam before the arrival of Idris. His son favoured Fez over Volubilis, but the latter was not completely abandoned, although there must have been substantial movements of its inhabitants to the new town of Moulay Idris nearby. Almoravid raids later in the 11th century spelt the end of many centuries of continuous occupation.

The ruins of Volubilis, which consist of no more than half of the original town, are located on a commanding site at the foot of the Jbel Zerhoun, bordered by the two wadis , Khoumane and Ferdassa. The ancient town is well defined by the remains of its walls. They had about 40 interval towers and were entered through eight gates. The buildings of Volubilis are for the most part constructed using the grey-blue limestone quarried nearby on the Zerhoun massif. They are notable for the large number of mosaic floors still in situ . Although they do not attain the artistic level of other North African mosaics, they are lively and varied in form and subject matter. The capitolium abuts on the south end of the basilica. Its cella (sanctuary) is reached by means of a wide flight of steps. Adjoining the capitolium are the contemporary baths, which show evidence of having been reconstructed more than once.

Source : UNESCO/CLT/WHC

Description historique

Le nom de Volubilis est connu par les textes anciens mais également grâce aux témoignages épigraphiques nombreux sur le site. Son origine est inconnue, mais il pourrait s’agir d’une version latine du nom berbère du laurier-rose, oualili, particulièrement abondant sur les rives de l’oued Khoumane serpentant autour d’une partie du site.

Dans des écrits datant du 1er siècle ap. J.-C., le géographe romain Pomponius Mela décrit Volubilis comme un site de taille moyenne, bien qu’il ne l’ait jamais visité. Pline l’Ancien et, au 2ème siècle ap. J.-C., l’Itinéraire d’Antonin le Pieux, tout en mentionnant la situation géographique du site, ne font aucun commentaire sur sa superficie.

Son emplacement aisément défendable au pied du Jbel Zerhoun, tout comme la fertilité des sols de la plaine, favorables à l’agriculture et à la culture d’arbres fruitiers (surtout d’oliviers), ont séduit les hommes qui se sont établis sur le site de Volubilis dès le 3ème siècle av. J.-C., comme en témoigne une inscription punique trouvée dans la ville. A l’époque du royaume de Maurétanie, dont la capitale se trouvait à ce même endroit du 3ème siècle av. J.-C. à l’an 40 ap. J.-C., Volubilis possédait déjà des remparts encerclant 12 hectares. Il apparaît que la disposition de la ville, conforme à un plan régulier, s’apparente au modèle punique hellénistique.

La ville s’est développée sur le modèle romain sous les règnes de Juba TI et de Ptolémée (25 av. J.-C. à 40 ap. J.-C.), au moment où elle a peut être été une capitale. En 40 ap. J.-C., l’annexion par les Romains du royaume de Maurétanie donne naissance à deux provinces : la Maurétanie Césarienne à l’est et la Maurétanie Tingitane à l’ouest (où elle obtiendra le statut de municipe). Elle ne tarde pas à s’étendre à son maximum, avec la construction de nombreux bâtiments publics et privés, ces derniers étant surtout affectés à des installations artisanales et industrielles, en particulier pour la production d’huile d’olive, principale denrée de la région. Des témoignages épigraphiques mettent en évidence la mixité de la population de Volubilis pendant la période romaine : Juifs, Syriens et Espagnols côtoyaient la population indigène africaine.

En 168-69, sous le règne de Marc Aurèle, est construit un rempart comportant huit portes monumentales ; puis les empereurs Sévères enrichissent le centre de la ville de plusieurs monuments (dont un capitole et une basilique) grâce à l’exonération d’impôts décidée par Caracalla, événement commémoré par la construction d’un arc de Triomphe en son honneur.

Au début du règne de Dioclétien, en 285, les Romains quittent soudainement le sud de la Tingitane, pour des raisons encore inconnues. Volubilis sombre alors dans les “ténèbres” jusqu’à l’accession au trône d’ldriss 1er. L’aqueduc alimentant la ville en eau ayant été démoli, les habitants de Volubilis (appartenant pour la plupart à la tribu berbère des Baquates) s’installent à l’ouest de l’arc de Triomphe où ils développent une nouvelle zone d’habitations près de l’oued Khoumane. Cette zone est séparée de la ville haute par un nouveau rempart qui descend jusqu’au cours d’eau. La zone de l’arc de Triomphe devient alors le cimetière de la commtmauté. Quatre inscriptions datant de 599 à 655 démontrent qu’il s’agissait d’tme commtmauté chrétienne dotée d’institutions toujours en place à cette époque.

L’influence des razzias opérées par Oqba ben Nafi (681) ou Moussa ben Nasser (710) sur Volubilis n’est pas clairement définie. Cependant, la présence de certains documents et pièces de monnaie indique que la ville s’était convertie à l’islam avant l’arrivée d’ldriss. Au cours des luttes opposant Abbassides et Chiites, Idriss, descendant du calife Ali, est contraint à chercher refuge au Maroc, où il est accueilli avec bienveillance par le chef de la tribu Aouraba établie autour de Volubilis. Il s’établit à “Oualila”, point à partir duquel il ne tarde pas à s’emparer des rênes du pouvoir en fondant tme nouvelle ville à Fès. Son fils Idriss Il (803-829) préfère Fès à Volubilis, mais celle-ci n’est pas pour autant complètement abandonnée, bien qu’on ait vraisemblablement assisté à tm important mouvement de population vers la ville voisine et plus récente de Moulay Idriss, créée après l’assassinat du fondateur de la dynastie des Idrissides en 791. Elle était d’ailleurs toujours habitée en 1068, comme l’attestent les récits d’El Bekri. Néanmoins, il semble que les razzias des Almoravides, vers la fin du llème siècle, aient mis fin à plusieurs siècles d’occupation continue.

Source : évaluation des Organisations consultatives

UNESCO

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