Art et politique mineurs chez Gilles Deleuze L’impossibilité d’agir et le peuple manquant dans le cinéma

J’aimerai

s examiner ici, sous forme d’ébauche, la manière dont les analyses de Deleuze sur les transformations, au cinéma, de la « représentation » du peuple réfléchissent certains aspects du problème plus général de la politique deleuzienne des minorités, propre à la situation mondiale actuelle1.

La vision esthétisante, et du coup inconsistante, de la politique que l’on prête – et que l’on objecte – parfois à Deleuze repose sur un malentendu. Ces critiques reposent en partie sur l’idée que Deleuze méconnaîtrait le fait que les impossibilités auxquelles sont confrontés les dominés dans les formes concrètes de leur existence aliénée rendent éminemment problématique une réappropriation de soi et du monde, c’est-à-dire une dialectique de la prise de conscience et de la pratique d’émancipation. La conséquence paradoxale serait que, méconnaissant les problèmes posés par ces impasses existentielles, notamment à force de valoriser la positivité de la situation d’hétérogénéité propre aux minorités, Deleuze méconnaîtrait l’irréductible et inassimilable négativité de ces situations, et procéderait par là même en sous-main à l’assimilation des minorités en les maintenant dans l’orbite de la représentation occidentale essentialiste de l’autre comme autre du soi (l’homme, adulte, européen, blanc, etc.)

Igor Krtolica

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