Les 100 Femmes qui font bouger le Maroc

( TÉLÉCHARGEZ LA MOUDAWANA) : Code de la famille pdf

C’est S.M. Le Roi Mohammed VI qui ouvre le bal du changement. Il est l’acteur historique n°1 de cette transformation de la Moudawana en Code de la Famille. C’est donc lui le 1er de la liste des 100 actrices(eurs) de cette belle mutation juridique. Dès lors, qui sont-elles ces militantes ?La plupart des féministes sont issues d’une vision culturelle seventies mâtinée d’Unem marxisant, de prison pour délit d’opinion pour certaines, d’infiltration de ciné-club, de création de section femmes dans différents partis pour, dans les années 83-84, jeter l’éponge et créer des associations féminines en bonne et due forme.

La gauche tendance extrême, donc ! En 1992, l’UAF lance la campagne de pétition pour la réforme de la moudawana. Un Million de signatures et une réformette plus tard, le mouvement se met sous tension : l’inenvisageable est désormais possible. Les actions, plus précises, plus ciblées, commencent sur le terrain. Dès 1995, des centres d’écoute de femmes victimes de la violence juridique, physique et psychologique s’ouvrent. Et FDM naît en novembre de cette année-là, offrant une plate-forme régulière et conséquente de la lutte. L’embryon de la société civile prend sérieusement forme et les colloques n’en finissent plus de louer des salles dans les plus grands hôtels de Casa et de Rabat au grand dam des gens de terrain, journalistes y compris, qui ne comprennent pas cette déperdition de moyens quand les associations travaillent avec trois bouts de ficelle.
1998. Gouvernement d’Alternance avec M. Youssoufi, Premier Ministre. L’ensemble des associations féminines, pétries de relents politiciens, décide d’annuler une marche prévue pour le 8 mars. Ce sera l’une des plus grossières erreurs de ce mouvement. Dès lors, le Gouvernement composé d’un illustre Ministre des Habous d’obédience wahhabite, n’aura de cesse de se déboulonner sur cette question. Sauf Saïd Saadi, qui tel un honorable capitaine, coulera avec le bateau suite aux remugles barbus et voilés de la marche du 12 mars 2000 provoqués par le Plan d’Action National. La création de la Commission, de par sa composition – à moitié réac – donnera également des sueurs froides à l’ensemble de la planète féministe. Reste qu’au sein de cette Commission, les modernes bossent. Et qu’à l’extérieur, un lobby s’organise avec les actions efficaces du Printemps de l’Egalité. Enfin, le 10 octobre et la chance d’avoir au sommet de l’Etat une vision bicéphale du contenu intellectuel de la réforme.
Reste que. Sans l’action de toutes ces femmes et ces hommes que nous vous présentons dans ce dossier -et nous présentons d’avance nos excuses aux personnes qui, faute de place, n’ont pu être intégrées dans notre liste-, le dossier moudawanesque n’aurait pu avancer aussi vite dans un contexte géopolitique aussi délicat. Pour avoir, en tant que journalistes, rencontré des dizaines et des dizaines de fois ces militantes dans leurs modestes locaux jusqu’à point d’heure, touché du bout des yeux leur foi indéfectible et leur disponibilité totale à la cause des femmes, nous savons que le Code de la Famille est leur victoire. Leur grande victoire. À l’aune du n°100 de FDM, un hommage s’imposait donc ! Merci mesdames.

La rédaction

Bouchra Abdou Membre fondatrice de la Ligue Démocratique pour les Droits de la Femme (LDDF)
Bouchra Abdou a tout juste 24 ans, lorsqu’elle devient la Secrétaire Régionale de la LLDF à Casablanca. Cours d’alphabétisation, séances d’écoute, orientation juridique, elle a été de tous les terrains. Depuis 2002, elle est responsable des ateliers de formation sur l’égalité et la citoyenneté dans les lycées, les collèges et les associations. Lorsqu’on lui demande ce qui l’a poussée à entrer dans le combat de l’égalité, elle répond : “La lutte quotidienne de la femme marocaine, que ce soit chez elle ou dans la rue, en général, et le harcèlement sexuel, en particulier”. Avec la joie et le soulagement de voir la femme considérée comme un être à part entière par la nouvelle Moudawana, Bouchra déclare : “Un travail d’éducation s’impose pour éclaircir les différents points du nouveau code de la famille, corriger les idées fausses et organiser des formations pour toute la société”.

Fatima Agouray Membre du Centre d’Ecoute pour femmes agressées.
C’est quand son mari l’a rejetée avec deux enfants sur les bras que Fatima Agouray a décidé de relever la tête et de lutter pour les droits de la femme. Elle a adhéré en 1996 à l’ADFM et en 1999, elle est devenue membre du Centre d’écoute pour femmes agressées. Concernant la réforme de la Moudawana, elle dit être fière mais, en même temps, consciente que le mouvement féminin a encore beaucoup de chemin à faire : “Et si on commençait par le chantier le plus dur celui des mentalités calcifiées, moyenâgeuses ?”, propose-t-elle.

Cherifa Alaoui El Mdaghri Conseillère du Ministre de la Santé en charge du dossier de la santé de la mère et de l’enfant
Dès le début des années 80, lors de son passage à l’Unicef, Cherifa Alaoui El Mdaghri souligne la nécessité de porter la question de l’instruction des mères comme vecteur principal de la réduction de la mortalité infantile. Plus tard, elle devient membre fondateur du Collectif Maghreb Egalité. Du fait de ses différentes missions, elle a énormément œuvré pour la planification, la gestion et le suivi de programmes de scolarisation des petites filles dans le rural.

Zhor Alaoui El Mdaghri Membre fondatrice et première vice-présidente de l’UAF
A vingt ans, Zhor Alaoui El Mdaghri publie son premier article sur “la liberté de la femme”, dans le journal Al Alam. Plus tard, de 1984 à 1992, après avoir contribué à sa fondation et intégré son comité de rédaction, elle publie plusieurs articles et études relatives à la femme et aux droits de l’homme, dans le journal 8 Mars. Elle consacre sa vie à l’enseignement, dès l’âge de dix-sept ans, dont vingt-cinq à l’IURS, à la section d’Anthropologie et sciences sociales (1975-2000) ; ainsi que des années de militantisme et de responsabilités depuis 1948, au sein de grandes instances des droits humains et du militantisme féminin (membre fondateur et vice-présidente de l’UAF en 1987, et vice-présidente de l’OMDH en 1991). Sa conception du féminisme s’inscrit dans le cadre théorique d’un rapport de force, entre la pensée mâle et dominante, et celle qui émerge du mouvement féministe.

Zineb Alaoui Soce Présidente du Comité de soutien à la scolarisation de la fille en milieu rural
Membre de l’ADFM-Rabat, Zineb Alaoui est aussi professeur de géographie au CNRST. Le déclic, elle l’a eu lors d’une enquête qu’elle a réalisée dans le cadre de ses études, “j’ai été scandalisée par la précarité de la situation sociale et par la fragilité du statut des femmes”.
Le 10 octobre dernier, à l’annonce du discours de SM, elle a ressenti un grand espoir pour ce pays, “mais cela exige de tout marocain une grande mobilisation”. Aujourd’hui, son combat reste toujours le même : scolariser, éduquer et former à la citoyenneté et aux valeurs d’éthique le maximum de filles dans le rural.

Najat Allem Ecoutante au centre SOS Annajda (Union Action Féminine)
Bénévole au centre Lalla Meriem pour les enfants abandonnés, Najat Alem est également membre du bureau de l’UAF à Rabat où elle est chargée de l’accueil et de l’écoute de femmes victimes de violence au Centre “SOS Annajda”. Le discours du 10 Octobre 2003 redéfinit, selon elle, “un code global pour la famille, en exprimant avec plus d’équité les obligations et les droits du mari et de la femme, tout en prenant en compte les droits de l’enfant”. Elle insiste, pour l’avenir, sur la nécessité pour le mouvement féministe marocain d’intégrer la femme, sans oublier de veiller à une application efficace de ce dernier.

Fouzia Assouli Secrétaire Gle de la Ligue Démocratique des Droits de la Femme
En 1999, lorsque le plan d’intégration butte contre l’opposition des conservateurs et des islamistes, Fouzia Assouli suspend son activité de cabinet de consultante juridique et fiscale, pour s’attaquer à temps complet à l’épineux dossier de la situation de la femme au Maroc. Elle sait que pour avancer, la question féminine requiert un cadre de travail et de réflexion autonome et spécifique. Première nécessité ? Mettre fin à l’institutionnalisation de la discrimination, si l’on veut voir changer les mentalités et transformer la société. Le 10 Octobre : “C’est la date d’une dignité retrouvée pour les femmes marocaines, et la victoire d’un choix courageux pour une société moderniste, égalitaire et juste pour les hommes, les femmes et les enfants”. Il s’agit, désormais sur un terrain plus sûr, de concrétiser la réforme, de promouvoir l’éducation à l’égalité et à la citoyenneté, et de lutter contre l’obscurantisme. Pour cela, il faudra multiplier les centres d’écoute, organiser de grandes campagnes d’information destinées en priorité aux femmes analphabètes et rurales (les plus vulnérables), et enfin, assurer le suivi et la bonne application de la loi.

Khadija Amatarz Secrétaire de direction à l’Association Démocratique des Femmes du Maroc
C’est en 1996 que Khadija Amatarz intègre l’ADFM. Ce qui l’a poussée à s’investir dans le domaine de l’égalité et des droits des femmes ? Sa révolte contre l’injustice : “Les violences et la discrimination à l’égard des femmes sous le couvert de l’Islam politique ne traduisent pas du tout à mon sens les valeurs d’équité, de justice et de tolérance véhiculées par notre religion et le Coran”. Le 10 octobre a été selon elle un mirage qui devenait une réalité : “Je dirais que ce jour est celui de la “renaissance” de toutes les femmes de mon pays. Maintenant, le plus important reste la sensibilisation du grand public”.

Khadija Amiti Présidente de l’association Chaml
Dans les années 80, elle rencontre un groupe de femmes militantes avec lesquelles elle fonde le journal 8 mars qui récoltera un million de signatures pour l’amendement de la Moudawana. Son engagement dans la lutte pour les droits de la femme est né il y a vingt ans. Aujourd’hui professeur de sociologie à l’Université Ibn Tofail à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Kénitra, elle est présidente de l’association “Chaml” pour la famille et la femme, membre du comité de pilotage de la “Chaire UNESCO Femmes et ses droits”, et membre du Printemps de l’Egalité ainsi que de l’Organisation des Droits de l’Homme. Concernant l’événement du 10 octobre, Khadija Amiti considère que “l’essentiel a été fait et que le combat des femmes continuera jusqu’à l’obtention d’un code meilleur.” Elle reste convaincue qu’un vrai travail reste à faire sur la perception de l’image de la femme au Maroc.

Saadia Bajjou Assistante sociale à la Ligue Démocratique des Droits des Femmes
Elle a été à l’école parce que le jour où le directeur a rendu visite à sa famille, elle était tout simplement… en âge d’y aller. Par hasard, donc. Ses deux autres sœurs n’ont pas eu cette chance. Assistante sociale à la LDDF depuis 1994, elle se bat chaque jour contre la violence morale, physique et sexuelle qui était faite aux femmes, dans un cadre jusque-là parfaitement légal. À ses yeux, le plus grand apport de cette réforme est la mobilisation collective ainsi que la prise de conscience générale des femmes, toutes catégories sociales et milieux socioculturels confondus, de la lutte commune pour leurs droits.

Fatiha Belghiti Alaoui Membre de l’association Jossour
Animatrice d’ateliers de théâtre et d’arts décoratifs à la Faculté des lettres et des sciences humaines à Meknès, Fatiha Belghiti Alaoui travaille sur le terrain en organisant des soirées artistiques au profit des enfants abandonnés ou malades, des personnes internées en hôpital psychiatrique et des mineurs incarcérés. En tant que femme, elle se dit concernée par tous les cas d’inégalité et d’iniquité qui pèsent sur la Marocaine. Elle participe à des tables rondes visant à informer les femmes et à leur faire prendre conscience que le Code de la Famille préserve l’équilibre familial et l’intérêt des enfants.

Soumaya Belhabib Vice-présidente de l’association “Chaml”
Deuxième vice-présidente au sein de l’Association “Chaml” pour la recherche sur la famille et la femme à Kénitra, Soumaya, professeur de Littérature Anglaise, est consciente que les femmes et les hommes doivent tous deux veiller à ce que le nouveau code de la famille soit appliqué sans bavures. Ayant représenté l’association dans plusieurs séminaires à l’étranger, notamment à l’université d’York en Angleterre durant l’année 2000, Soumaya est membre de la Chaire UNESCO concernant la femme et ses droits. C’est par réaction au sentiment de fragilité et de vulnérabilité des femmes par rapport aux lois anciennes du statut personnel qu’elle s’est engagée à défendre la cause féminine. Mais le vrai combat pour Soumaya réside au niveau de tout le travail à faire sur le changement des mentalités et des stéréotypes qui ternissent l’image de la femme afin d’instaurer une culture égalitaire.

Fatéma Belmouden Membre du Bureau politique de l’Union Socialiste pour les Forces populaires
Cette parlementaire a entrepris depuis 1968 un combat syndical au sein de l’union nationale des étudiants marocains pour libérer la femme et travailler à l’égalité entre les sexes. Plus que jamais, Fatéma croit que l’injustice vis-à-vis de la femme ne peut disparaître si la femme, elle-même, n’occupe pas de postes décisionnels. Pour elle, ses deux plus grandes joies restent la liste nationale des femmes parlementaires et le nouveau Code de la Famille qui répond davantage à l’évolution de la société marocaine et aux espoirs des mouvements féministes. Le discours royal du 10 Octobre a tout résumé, selon l’avis de Fatéma : la Monarchie est garante pour préserver l’équilibre au sein de la société ; le statut personnel est désormais une loi qui va aider la femme à mieux s’épanouir.

Chadia Belhadi Présidente de l’association “Aspirations Féminines”
Fondatrice et présidente de l’Association “Aspirations Féminines”, Chadia Belhadi a toujours répondu présente pour améliorer la situation de la femme. Ayant un sens très fort de la citoyenneté et bien décidée à mener le changement des mentalités, la jeune femme, docteur en littérature arabe, veut s’impliquer dans une société civile progressiste. Pour cette femme qui mène de front plusieurs activités, son association a une responsabilité dans le développement du pays qui passe nécessairement par un long travail social et citoyen pour l’amélioration de la condition de la femme. A ses yeux, la sensibilisation des femmes comme des hommes sur le contenu du nouveau code doit être l’objectif prioritaire de toutes les composantes de la société.

Amina Belkahla Assistante sociale à l’association “Aides Sociales”
Visionnaire, confiante, Amina est une femme de terrain. Au contact de femmes qui se présentent chaque jour à l’association, elle est témoin des cas de répudiation, de maltraitance et assiste aux drames des enfants abandonnés. Sa compréhension et sa patience émanent de sa conviction que l’Etat ne peut pas assumer à lui seul toutes les souffrances de la société. La société civile doit participer à l’aide au développement afin d’améliorer la situation des femmes, notamment celles touchées par l’analphabétisme. Pour Amina, la nouvelle Moudawana est une petite bataille comparée à celle qui n’est pas été encore entamée : le changement des mentalités.

Damia Benkhouya Membre du Bureau de l’Espace Associatif
Après un diplôme de l’ENAP et une licence en littérature arabe, elle rejoint l’Association des Droits de la Femme en 1993, dont elle devient la présidente de 1995 jusqu’à 2001. Damia ne s’est pas arrêtée à ce niveau puisqu’elle a participé à la fondation du réseau de soutien pour le plan d’intégration de la femme et le Printemps de l’Egalité. À son actif, cette doyenne de la lutte féminine, compte plusieurs publications sur des thèmes qui concernent de près les femmes, tels le harcèlement sexuel, la violence et autres sujets. Son meilleur souvenir reste sa participation à la création en début des années 80 du journal féminin “8 Mars”. Damia reste lucide et pense qu’il y a encore du travail à accomplir de la part des mouvements féminins, surtout dans l’éducation et les médias. Quant à son combat personnel, Damia est catégorique : lutter contre toute forme de violence contre la femme en déridant les mentalités.

Asmae Benadada Membre du Collectif Horizons Féminins
Asmae Benadada a été membre de l’UAF (1987-1993), elle est aujourd’hui membre du bureau du réseau d’associations Le “Collectif Horizons Féminins Fès”. Professeur de philosophie à Fès, elle prépare en même temps son doctorat national en sociologie sur “Femme et Politique”. Les accidents de parcours liés à sa condition de femme auraient pu la décourager, lorsqu’elle a été contrainte d’interrompre ses études universitaires à Toulouse, et plus tard, lorsqu’elle s’est heurtée à l’opposition levée contre le mouvement féministe à ses débuts et le projet de l’UAF en particulier. Mais le 10 octobre 2003, malgré la menace persistante de fléaux comme l’intégrisme, l’analphabétisme et la pauvreté, amorce “un premier pas vers une véritable culture de l’égalité, qu’on souhaitait voir s’installer depuis longtemps, et que les instances politiques, religieuses et éducatives doivent suivre et complémenter…”.

Malika Benradi Présidente de l’AFARD
Lorsque la 48ème session des Nations Unies sur le statut des femmes s’est ouverte à New York, du 1er au 12 mars 2004, c’est Malika Benradi qui représentait le Maroc en tant que présidente de l’Association des Femmes Africaines pour la Recherche et le Développement. Elle est de ceux qui mènent de pair leur carrière nationale et les activités du réseau international. Elle cumule aussi l’enseignement du droit, l’activité de consultante auprès du BIT sur le travail des enfants et la recherche permanente sur la question féminine. Elle renonce à une carrière d’avocate pour la voie universitaire : “Je ne me voyais pas recourir à un droit inégalitaire (à l’époque), pour défendre la cause des femmes”, dit-elle. Ayant travaillé sur l’élaboration du Plan, elle mesure pleinement la justice que rend aux femmes le code de la famille. Code qui traduit, selon elle, une démarche de “déconstruction des rapports sociaux entre hommes et femmes” tels qu’ils étaient, et consolide le processus démocratique en liant la démocratisation de l’espace public et celle de l’espace privé : “Il faut instaurer une culture de l’égalité entre les sexes, à l’école, dans l’université, la politique, les médias et l’univers professionnel, pour aboutir à la parité homme et femme dans tous les espaces où s’organise la vie en société”.

Halima Bennaoui Coordinatrice de la section LDDF de Rabat
Son meilleur souvenir de militante, c’est la création le 7 janvier 1996 de la section de la LDDF à Rabat, après trois années de résistance face à la censure des forces de l’ordre et du directeur de la maison de jeunes ANNOUR du quartier Yaacoub El Mansour. Halima Bennaoui est membre de l’AMDH depuis 1981, et membre fondateur de la LDDF ; avec le discours du 10 octobre 2003, Halima est convaincue que “de nombreux tabous consacrés par l’ancien code, et qui poursuivaient la femme, vont partir en morceaux avec les nouvelles dispositions”. Le mouvement féministe doit, selon elle, protéger ses récents acquis et revoir à la lumière du nouveau code le dossier de ses revendications : “il doit notamment travailler en concertation et en synergie avec toutes les autres forces démocratiques, et s’intégrer désormais au processus global de démocratisation”.

Naïma Benwakrim Conseillère technique au cabinet du ministre chargé de la condition de la femme de 2000 à 2002
C’est à l’âge de 14 ans que Naïma Benwakrim intègre le mouvement associatif et où elle découvre les écrits de Nawal Saadaoui : “La lecture de ses œuvres ont transformé ma manière de percevoir mon identité en tant que femme”. Membre fondateur de l’Espace Associatif, de Jossour et de l’AMD, elle s’est toujours battue pour garantir à la femme plus de droits. La mobilisation des femmes pour la réforme de la Moudawana en 1992, la marche du 12 mars 2000 sont autant de meilleurs souvenirs pour une militante. “J’ai ressenti de l’euphorie le 10 octobre dernier, mais il faut consolider les acquis en poursuivant la mobilisation. Il reste d’autres combats à mener pour assurer la réforme des autres lois discriminatoires telles que le code de la nationalité”.

Leïla Benyassine Rédactrice en chef de Nissae Mina Al Maghrib
Professionnellement, Leïla Benyassine est passée de linotype à l’Internet, en bifurquant par la radio, les études sur les médias… Déclic de sa lutte pour l’égalité ? Son inoubliable passage à FDM qui lui a “permis de constater sur le terrain ce que vivent les femmes (et les enfants) comme injustices”. Son credo : collaborer avec différentes associations féminines sans jamais hiérarchiser la douleur humaine : celle d’une femme qui se retrouve du jour au lendemain après des années de mariage, dans la rue avec ses enfants. Celle d’une gamine qui vit dans un patelin paumé, qui ne peut poursuivre ses études au collège car l’Etat ne lui en offre pas les moyens d’accès, celle de la petite bonne de 8 ans, renvoyée à la rue après bastonnade par sa patronne… Et après la réforme de la Moudawana ? “Le combat continue pour faire appliquer les nouvelles lois à la lettre ”. Son nouveau cheval de bataille ? Beaucoup de chantiers, dont L’EAU avec l’association ALMAE (Alliance Maghreb Machrek pour l’Eau).

Zhira Bibou Fondatrice de l’association des Femmes du Sud
Zhira est fière de faire partie des “gens du terrain”, ayant mené un combat au sein de l’Association Démocratique des Femmes du Maroc (ADFM) d’Agadir. Par la suite, en 1999, elle a fondé l’Association des Femmes du Sud. Depuis sa fondation, l’association a entrepris des campagnes de sensibilisation pour encourager les femmes à prendre part au travail associatif et d’organiser des débats et rencontres pour répertorier les besoins et priorités des femmes de la région. Dynamique, travailleuse, Zhira espère ainsi voir appliquer la Moudawana pour respecter l’esprit de famille. Elle veillera à étendre cette nouvelle philosophie en accord avec d’autres associations pour mener à bien sa mission.

Rahma Bourquia Membre de la Commission Consultative de la Moudawana
Très engagée dans la lutte pour les droits de la femme, elle considère qu’il est un devoir de trouver des réponses aux questions qui préoccupent la société à laquelle on appartient. Docteur en sociologie et consultante de plusieurs organismes internationaux tels l’OMS, le Conseil de Population au Caire et la Banque Mondiale, elle est également professeur visiteur et conférencière dans des universités américaines, arabes et européennes. Elle a écrit plusieurs livres sur la situation de la femme dans la société et s’intéresse tout particulièrement aux rapports de pouvoir dans les relations sociales et dans les rapports de genre. Être membre de la Commission Consultative de la Moudawana lui a donné le sentiment de “contribuer à construire un édifice utile pour la société.” Son combat se situe sur le terrain de l’enseignement et de l’éducation. Le prochain à mener pour le mouvement féministe marocain devrait s’inscrire, selon elle, dans le cadre de la lutte contre l’analphabétisme, la pauvreté et l’exclusion.

Amina Bouayach Responsable du secteur féminin à l’OMDH
Après les attentats du 16 mai 2003, Amina Bouayach conseillère en communication crée avec d’autres militants l’Organisation Marocaine de Lutte Contre la Haine et le Racisme (OMLCHR), pour barrer la route au fanatisme religieux. Actuellement membre des bureaux nationaux de l’OMDH et de l’OMLCHR, elle a également contribué à la fondation de Jossour. Son combat pour la femme s’inscrit dans l’histoire du mouvement pour l’égalité, et les récents acquis sont, d’après elle, l’aboutissement de la dynamique interne du mouvement féminin. Depuis l’adoption récente de l’“Ijtihad” (l’interprétation du texte) et la soumission de la ratification du code de la famille par le Parlement, le combat continue dans l’espace public. Car il s’agit maintenant de changer les mentalités, les mœurs, de sortir les femmes de l’analphabétisme et de leur libérer l’accès au champ politique.

Amina Boukhelkhal Membre de l’association Marocaine des Femmes Progressistes
Le parcours de cette férue de mathématiques est jalonné d’activités. Depuis 1979, Amina est lancée dans l’action associative, notamment l’association marocaine des droits de l’homme. De plus, elle est l’une des membres fondatrices de l’association des Femmes Progressistes. Amina a toujours travaillé de façon acharnée sur le dossier des petites bonnes et tient à préciser que son association a été l’une des premières à soulever cet épineux problème. Après le nouveau Code de la Famille, Amina est plus confiante et reconnaît que si le projet a vu le jour, c’est grâce, d’une part, à la mobilisation et le combat de tous les mouvements féministes du Maroc. Elle reste catégorique pourtant : pour accompagner le nouveau Code de la Famille, il faut à tout prix désenclaver les mentalités.

Layla B Chaouni Directrice des éditions Le Fennec
Son catalogue éditorial parle pour elle. Depuis 1987, Layla B. Chaouni a choisi d’éditer des collections notamment celle d’“Approches”, plus de 10 titres, dirigée par Aïcha Belarbi et celle “Collection Femmes Maghreb”, 5 titres, dirigée par Fatéma Mernissi ainsi que “Collection marocaines citoyennes de demain”, “Visibilité des femmes”, toujours dirigées par F. Mernissi. En moins de 20 années, les éditions Le Fennec ont assis une crédibilité intellectuelle presqu’unique sur la place. En offrant sans relâche, une visibilité à la réflexion et à la production intellectuelle tournant autour des questions de l’émancipation de la femme, Layla a participé entièrement au combat émancipateur. Et même “Toutes voiles dehors” de Nadia Yacine est assumé comme tel : “Cet ouvrage permet de lire une pensée opportuniste et sans tenue. De quoi rassurer les modernes que nous sommes !”. Faire passer et appliquer le message de la modernité, la vocation de Layla. B Chaouni ne s’arrêtera pas en si bon chemin.

Aïcha Ech-Chenna Présidente de Solidarité Féminine.
Orpheline de père à trois ans, Aïcha Ech-Chenna a connu dès sa plus tendre enfance une grande solidarité qui s’est ancrée en elle et ne l’a plus jamais quittée. C’est durant son travail d’assistance d’éducation sanitaire au service public qu’elle a contribué à la création d’un Comité de soutien aux enfants abandonnés et Solidarité Féminine en 1985.
En 44 ans de militantisme, elle a accumulé beaucoup de bons souvenirs que l’on retrouve dans son livre Miseria. En écoutant le Roi prononcer la réforme de la moudawana, “j’étais fière d’avoir participé au combat, j’entrevoyais toute la responsabilité à laquelle nous, société civile, devrions faire face pour accompagner cette décision (…) Si le code de la famille marque une avancée (…), il reste des progrès à faire dans les mentalités et la loi. Notre combat à Solidarité Féminine vise avant tout la reconstruction psychologique et sociale des mères et des enfants, la prévention pour éviter à d’autres les souffrances qu’endurent les mères célibataires”.

Najat Chentouf Membre de l’AMDH
Membre de l’AMDH et de l’AMEL (Association Marocaine pour l’éducation des jeunes) depuis 25 ans, Najat Chentouf est aussi la fondatrice de AMNA. Choquée par l’abus sexuel et la violence faite aux femmes d’une manière permanente, elle a pour ambition d’ouvrir un centre pour femmes victimes à Tanger pour les abriter des dangers de la rue. La marche du 12 mars 2000 constitue son meilleur souvenir de militante. Le discours du Roi l’a remplie d’espoir, mais elle a conscience que le combat pour les droits des femmes est encore long, juridiquement parlant.

Souad Chentouf Coordinatrice de l’Espace Féminin pour l’Appui et la Qualification
À l’âge de huit ans, Souad s’interroge déjà sur la politique de “ces hommes qui nous gouvernent”, et craint que la question de la femme ne les intéresse qu’au moment des urnes. Ex-présidente de l’UAF, section de Meknès (1999-2001), elle est actuellement membre de plusieurs associations de développement local, coordinatrice depuis février 2003 de l’espace féminin pour l’appui et la qualification, et administratrice adjointe à la préfecture de Meknès. Le 10 octobre 2003 marque pour elle une rupture historique : les femmes sont délivrées du statut de “mineures à vie”. Le mouvement féministe, en cours d’identification, reconnaît progressivement son autonomie, sa spécificité et l’enjeu démocratique qu’il représente. Quant à la société, elle est confrontée aujourd’hui à la question de la laïcité et à la place du religieux. “Répandre la “pensée féministe”, travailler à la prise de conscience de l’identité de la femme, et à l’intériorisation de la démocratie comme pratique, est le défi de l’éducation qui doit s’adresser à la société tout entière”, conclu-t-elle.

Nadia Cherkaoui Psychologue au Centre d’Ecoute des femmes victimes de violence juridique et psychologique
Nadia Cherkaoui n’estime pas faire partie des 100 femmes qui ont changé la Moudawana. car, dit-elle “mes activités professionnelles nécessitaient une neutralité incompatible avec le militantisme au sens strict du mot. Une attitude professionnelle qui ne me permet pas de brandir l’étendard du changement”. Certes. Mais en tant que psychologue, son écoute a permis d’accompagner certains changements et d’offrir un espace d’expression à la souffrance. Malgré la retenue qu’impose son travail, elle appréhende certains moments difficiles comme la situation des mères célibataires, la rencontre des femmes traumatisées dans le cadre quotidien des violences conjugales. Le 10 octobre : “j’ai immédiatement intercepté la mensuration considérable du pas franchi.” Reste la violence conjugale à définitivement baliser par la loi avec des textes précis clairs et sans ambiguïté.

Nouzha Chekrouni Ministre déléguée auprès du Ministère des Affaires étrangères et de la coopération chargée de la communauté marocaine résidante à l’étranger.
Une légitimité de militante pour une ministre ! Vice-présidente de l’Internationale des Femmes de 1997 à 2003, ministre déléguée chargée de la Condition de la Femme, la Protection de la famille et de l’enfance et l’Intégration des handicapés en 2000, secrétaire générale de la Commission des affaires de la Femme depuis 2001 et membre du conseil national d’orientation de Jossour, Nouzha Chekrouni a occupé tout au long de son parcours politique de hauts postes de responsabilité qui lui ont permis de lutter pour les droits de la femme et de la famille. À l’annonce du discours du Roi, elle s’est sentie fière et armée pour continuer le combat : “il faut s’organiser en réseaux afin que l’ensemble de la population adhère à ce projet de société et pour que toutes les femmes deviennent de véritables acteurs dans ce processus”. Son souhait maintenant est celui de pouvoir mener à bien sa mission et surtout “de voir mes enfants réussir leurs études et leur vie. C’est ça mon bonheur !”.

FAMA Figure historique de la Gauche marocaine
Vendredi 19 mars 2004. 13h20. La nouvelle tombe comme un couperet : Fama vient de quitter définitivement sa djellaba. Fama, elle qui n’a jamais eu d’enfants, ne s’est jamais mariée, Fama, la mère de toutes les militantes et militants n’est plus. C’est un choc immense pour toute la société civile. Fatéma Izaer dite Fama a accompagné tout le mouvement émancipateur du Maroc : de la lutte pour l’indépendance au suivi de la -très- laborieuse gestation d’une démocratie à venir. Première femme militante dans un parti politique pour la liberté d’expression (l’ex-UNFP devenu ensuite USFP), elle incarne pour tout le mouvement féminin, l’engagement au féminin dans la politique. Sa crédibilité, immense, en a fait une figure de proue – un centre d’écoute et d’orientation juridique porte son nom -. Sans concessions sur ses positions souvent radicales, Fama a consacré sa vie à la gauche. Ses derniers combats centrés sur la réhabilitation des anciens détenus politiques des années de plomb ainsi que de la cause palestinienne lui ressemblent. En front line, toujours. Fama incarnera pour toujours une certaine idée de l’engagement patriote et incorruptible. Fondamentalement moderne.

Houria Cherif Houat Membre du réseau d’associations de défense des droits des femmes pour le développement
La lutte pour l’égalité et le droit des femmes lui vient de 27 ans d’engagement politique et de militantisme associatif : elle est de tous les forums internationaux pour le droit des femmes et le développement, en plus de tous les efforts qu’elle déploie sur le terrain pour améliorer la situation juridique et socio-économique, les secteurs de l’emploi et l’entreprenariat féminin. Forte de sa double expérience politique et militante, elle a vécu les divergences qui ont entaché le mouvement féministe ainsi que les ambitions personnelles qui ont compromis la lutte collective pour le droit des femmes : “mais la foi en notre cause l’a emporté” répond-elle satisfaite. Avec cette fenêtre supplémentaire ouverte sur la démocratie, il est urgent de participer à une large campagne d’information et de sensibilisation au nouveau code, de veiller à son application, et de penser d’ores et déjà à “la relève”, à la transmission et à la formation à “l’esprit du féminisme”, en écrivant sur les différentes expériences de militantes, par exemple. A bon entendeur !

Zakia Chramo Coordinatrice du centre d’écoute “Hawaâ”
Formatrice de cours d’alphabétisation pour les femmes en 1999-2000, Zakia Chramo ne cache pas avoir été bouleversée par l’opposition farouche des conservateurs face au plan d’intégration de la femme dans le développement. La jeune femme, membre de l’Association “Ennakhil” pour la femme et l’enfant depuis 1998, a participé à plusieurs campagnes de sensibilisation au profit des femmes en prison et des victimes de la prostitution, sans oublier les enfants en situation difficile. Ayant suivi le dossier de la Moudawana de près, en prenant part aux activités du “Printemps de l’Egalité”, Zakia est consciente que la lutte doit continuer pour combattre toute discrimination à l’égard des femmes.

Amina Echchaikhi Secrétaire générale de l’ARFEDEC
Le développement de la région Nord est son arène : àTétouan, Amina fonde en 1996 l’Association de Recherche Féminine pour le Développement et la Coopération (ARFEDEC), puis le Centre d’Assistance pour les Femmes Maltraitées (CAFMAT) en 2000. Elle contribue à l’élaboration d’outils pédagogiques, et participe à des groupes de réflexion autour de la problématique féminine et l’intégration efficace de la femme à la société et au développement. Depuis le 10 octobre 2003, la discrimination sexuelle et la violence subies par les femmes marocaines sont désormais punies par la loi : “Nous avons réussi, avec le nouveau code, à poser le premier pas pour développer la culture des droits de l’homme et de l’égalité entre les sexes”. Pour cette militante du développement global, maintenant qu’hommes et femmes sont inscrits dans un jeu de rapports plus égalitaires, il s’agit d’organiser et de planifier la prise de conscience collective. “Pour cela, il faut, ajoute-t-elle, consolider l’image positive de la femme dans les médias, les supports pédagogiques…” Vaste programme.

Samira EL Benani Responsable du centre d’écoute et d’orientation de l’association “Troisième Millénaire et protection de l’enfant”
Native du sud, Samira a mené son combat à Fès au sein de l’union nationale des étudiants du Maroc avant de rejoindre l’association en question. Cette jeune licenciée en littérature française a essayé tout au long de son activité de se pencher sur les besoins des femmes et plus spécialement des femmes du Sud, comme c’est le cas d’Errachidia où il y a une forte dominance masculine dotée d’un esprit conservateur. Malgré tous les acquis de la femme, Samira pense qu’il y a encore du chemin à faire pour réussir le pari du développement.

Ouaffa Hajji Coordinatrice nationale de Jossour (Forum des femmes marocaines)
Secrétaire générale adjointe de la section féminine de l’USFP, Conseillère municipale de la ville de Rabat, Ouafa Hajji est également Directeur adjoint à Bank Al Maghrib. Militante dans l’âme, elle a réussi aussi bien dans sa vie professionnelle qu’associative et politique. Quand elle s’est rendu compte que “l’égalité souvent proclamée se heurtait dans les faits à des mentalités rétrogrades pour lesquelles le statut de la femme et la question féminine n’avaient pas la priorité ”, elle a décidé de mener le combat pour l’égalité, le respect, la reconnaissance et la dignité. Son meilleur souvenir a été l’annonce de la réforme de la Moudawana, “un engagement clair pour la modernité, un moment magique et nécessaire pour l’Avenir”.

Najia ELboudali Fondatrice du Club “Citoyenneté et droits humains”
Enseignante chercheur, géologue à l’Université Hassan II à Casablanca, elle est par ailleurs la fondatrice du Club “Citoyenneté et droits humains” de la faculté des Sciences Ain Chock. Najia Elboudali est membre du réseau international de lutte contre la violence sexuelle. Elle a, à son actif, plusieurs années de militantisme au sein du centre Fama, un centre d’information sur les droits des femmes dont elle a été l’une des fondatrices puis la directrice. De 1998 à 2002, elle est coordinatrice du réseau femme d’Amnesty International au Maroc. Experte en matière de formation des Droits Humains et de lutte contre la violence faite aux femmes, elle a, de par sa profession, découvert les réalités sociales qui touchaient les femmes du monde rural : analphabétisme, ignorance, dépendance économique, pauvreté… Suite à l’instauration du Code de la Famille, elle veut aujourd’hui s’engager dans une action visant le changement des mentalités.

Latifa El Bouhsini Membre du conseil national de l’OMDH
Elle a été la 1ère secrétaire de l’UAF (section de Rabat), membre de la rédaction du journal 8 Mars et membre de la coordination de la “Pétition pour un million de signatures” en 1992 à Paris. Il serait vain et réducteur de vouloir rendre compte du parcours de cette femme, spécialiste de l’Histoire du mouvement féministe marocain, et de la place de la femme dans les écrits et l’historiographie marocains du moyen âge. Au secrétariat d’état chargé de la condition de la femme, de la famille, et de l’intégration des handicapés où elle travaille, Latifa fait part de son expérience et de sa forte connaissance des acteurs politiques médiatiques et associatifs, mobilisés autour de la problématique féminine, dans le discours construit, réaliste et sensible d’une militante convaincue et convaincante ! Malgré son appréhension, c’est avec “un sentiment de joie d’avoir gagné la bataille” qu’elle a accueilli le nouveau code, signe d’une volonté de réforme aussi bien sur les plans symbolique, que politique et juridique. Pour le reste, il faudra s’armer de vigilance et de clairvoyance afin que les avancées réalisées sur le plan juridique puissent être palpables.

Zakia El Hachimi Membre de l’ADFM
Professeur universitaire membre du conseil scientifique de la Fac de Sciences de Rabat, membre fondateur et première présidente de la société marocaine de biochimie, Zakia El Hachimi consacre tout son temps au militantisme au sein de l’ADFM, de l’association de soutien à l’Unicef et de l’observatoire de droit des enfants. Enfant, elle se souvient que son grand-père appelait ses deux esclaves non pas par leur prénom, mais par des claques de la main, et que les femmes mangeaient après les hommes les restes de leur repas. Étudiante, elle s’est continuellement battue contre toutes les formes de pressions pour arrêter les études. Le jour de son mariage au consulat du Maroc à Paris, en l’absence de son père et de tout autre tuteur, “c’est le concierge du consulat qui m’a donnée à mon époux !”, a-t-elle décidé pour défier une loi si peu responsabilisante à l’égard des femmes. Le 10 octobre 2003 a donné raison à son geste : “je suis enfin majeure avant de mourir”, a-t-elle crié. Elle espére qu’un jour les mariages mixtes, entre une musulmane et un non-musulman, n’obligeront plus les époux à embrasser l’islam, et que leurs enfants pourront un jour choisir d’hériter également de la nationalité marocaine de leur mère.

Nouzha Idrissi Guessouss Membre de la Commission Royale Consultative de la Réforme de la Moudawana
Professeur et Chef de service à la Faculté de Médecine et au CHU Ibn Rochd de Casablanca, Nouzha Guessous Idrissi est enseignante, biologiste praticien hospitalier et chercheur. Elle est également vice-présidente du Comité International de Bioéthique de l’UNESCO. Etre membre de la Commission Royale Consultative de la Réforme de la Moudawana lui a permis de renforcer son engagement dans la défense des droits de la femme. La marche du 12 mars 2000 à Rabat reste d’ailleurs son plus beau souvenir de militante. Après la joie ressentie le 10 octobre, elle souhaite contribuer activement à l’appropriation des principes et des lois du Code de la famille par tous les Marocains et Marocaines et veiller à leur bonne application. Elle se dit par ailleurs très préoccupée par le problème des enfants abandonnés. Son combat personnel ? Vivre sa féminité, sa marocanité, son arabité et son Islam dans la dignité, la sérénité et la fierté !

Rita El Khayat Psychiatre, écrivain
L’injustice, Rita El Khayat l’a connue très jeune et c’est ce qui l’a poussée à s’engager dans la lutte pour l’égalité : “l’état des femmes, leur sacrifice, leur passivité et leur obéissance m’ont posé problème et je n’ai pas fini d’y réfléchir…”. Dès les années 85, elle publie un pavé dans la mare avec “Le monde arabe au féminin” où elle stigamtise la reproduction des discrimations à travers la mère arabo-musulame. Pour la première fois, la femme assume sa responsabilité dans sa soumission à l’homme. Plus tard, le discours du Roi a été une réponse à son article “Epître d’une femme à un jeune Monarque” (nov. 1999) dans lequel elle a décrit le désespoir des femmes qui trouve son origine dans le Statut du code personnel. Dans son écrit, elle demandait au Roi une solution qui instaurerait l’égalité entre les deux sexes. Aujourd’hui, “le combat du mouvement féminin est d’abord celui d’alphabétiser les filles, mettre en place un programme de planification familiale sérieux et veiller à la bonne application des lois, en l’absence de quoi les textes juridiques ne donneront pas l’effet attendu…”.

Aïcha El Khamlichi Membre de l’association Protection de la Famille
Aïcha est une habituée de la lutte et prend part à tout ce qui relève de la famille. Même si elle est conservatrice des fonds de l’association, cette native de Tétouan prend part à plusieurs activités : prendre soin des enfants abandonnés ou orphelins, et assister les femmes prison. Elle considère le nouveau Code de la Famille comme une réhabilitation qui devrait accompagner le processus démocratique en marche au Maroc. Elle espère d’autres changements car la famille est un grand chantier qui exige beaucoup d’énergie. Aïcha ne s’arrête pas à mi-chemin, elle compte poursuivre son combat et prépare déjà des campagnes de sensibilisation et des journées d’information pour mieux appliquer le Code de la Famille. Car le changement passera par une bonne communication. CQFD.

Fatéma El Maghnaoui Directrice du centre “SOS Annajda”
À l’âge de 15 ans, le spectacle de petites bonnes qui accompagnaient leurs maîtresses à l’intérieur des “hammams”, pour porter les seaux d’eau, a été un déclic dans son engagement pour la cause des femmes. Actuellement inspectrice régionale à l’Académie de Rabat pour l’éducation et la formation, Fatéma El Maghnaoui a fondé le journal 8 mars en 1983, l’UAF en 87 et dirige le centre SOS ANNAJDA depuis 1996. Véritable baromètre des mentalités et indicateur sur la famille et le couple, ce centre lui démontre d’ailleurs le fossé qui la sépare de toutes les femmes victimes qu’elle reçoit, et auxquelles il faudra donner d’abord du réconfort et du soutien, mais aussi une éducation à la citoyenneté. “Le 10 octobre 2003, je suis née en tant que citoyenne”, affirme-t-elle.

Touria El Omari Fondatrice de l’association “Epanouissement Féminin”
Après un passage remarqué à l’association marocaine des droits de la femme, la jeune femme fonde son association en 1999 avec une volonté de changer ce qui relève des droits de la femme et de sa condition au sein de la société. Elle préside aussi le centre d’écoute “Chama”, et pour une proximité plus efficace, elle a choisi d’ancrer son association dans un quartier marginalisé où les femmes vivent des situations plus dures qu’ailleurs. Touria n’en revient pas de cette première victoire remportée par les femmes après le nouveau statut personnel et se prépare déjà à mener des campagnes de sensibilisation pour lutter contre les stéréotypes. Elle s’apprête également à faire un suivi du côté juridique afin de vérifier si les nouveaux textes seront assistés par des lois adaptées.

Najat Ikhich Membre du conseil national de la LDDF
Depuis que son père lui a refusé le droit d’aller à l’école, à l’âge de sept ans, Najat Ikhrich est pour ainsi dire “sur le Front”. Depuis cette victoire et de combat en combat, elle se lance dans un programme sans fin de sensibilisation et de conscientisation à l’égalité et la citoyenneté, et dans la lutte contre l’obscurantisme et toute forme d’extrémisme. Actuellement membre du conseil national de la LDDF, elle est depuis 1976 de tous les conseils, comités et bureaux nationaux engagés dans le mouvement féministe, et participe également au réseau international, à travers congrès et conférences sur le droit des femmes. Un grand pas a été fait le 10 Octobre 2003, dans la marche vers une société moderne et démocratique, et la priorité pour demain est d’engager l’ensemble des Marocaines et Marocains dans ce processus de changement des mentalités et de la société.

Assia El Ouadie Membre du Conseil Consultatif des Droits de l’Homme
C’est en tant que magistrate chargée de l’exécution des jugements relatifs aux affaires du statut personnel qu’Assia El Ouadie a eu l’occasion de rencontrer des cas d’injustice qui l’ont fortement marquée : “Une femme avait été condamnée à regagner le domicile conjugal. Lors de notre entretien, elle pleurait à chaudes larmes en me suppliant de ne pas la laisser y retourner, quitte à l’envoyer au fond du Sahara ! Entre le respect de la loi dont j’étais la garante et qui forçait cette femme à reprendre sa vie de couple et le bon sens humain qui me poussait à la protéger, j’étais totalement meurtrie”. Membre fondateur de l’Observatoire Marocain des prisons, elle revenait d’une prison d’El Hoceima lorsqu’elle a entendu à la radio le discours royal : “Maintenant que les dispositions légales sont promulguées, il faut les banaliser pour qu’elles s’insèrent naturellement dans notre vécu au quotidien”, conclut-elle.

Fathia Errama Assistante juridique au centre d’écoute, de formation et d’orientation juridique “Najma”.
Ayant suivi plusieurs formations dans le domaine des droits de l’homme, de l’enfant et des petites bonnes, Fathia conseillère juridique au centre d’écoute “Najma” a entrepris sa lutte après avoir été interdite par sa famille de prendre part à toutes activités associatives durant sa jeunesse, alors que son propre père était un combattant membre d’un parti réputé. Les cas d’injustice les plus bouleversants pour elle demeurent le cas des femmes divorcées. Selon Fathia, les mouvements féministes doivent se pencher sur le suivi du nouveau statut personnel et demander à ce qu’il y ait une réhabilitation des points qui ont été négligés dans ce nouveau projet.

Malika Ghazzali Secrétaire générale de l’OMDH
Membre active de l’OMDH, elle milite depuis le début des années 1970 pour la liberté d’expression et la libre opinion. En rencontrant des détenus politiques dans l’enceinte de la prison en 1974, elle décide de défendre toute forme d’injustice. Toute son action de terrain a été centrée sur l’aménagement de la vie pénitentiaire. A priori, l’action de Malika Ghazzali semble éloignée de la réforme de la Moudawana. A priori seulement car c’est oublier les liens organiques des différents acteurs de la société civile. Et à présent ? “Je vais me battre pour l’obtention de la nationalité marocaine pour tous les enfants nés de femmes marocaines mariées à des étrangers. Ainsi que poursuivre celui de l’éducation des prisonniers sur les droits de l’homme et sur la citoyenneté.”

Leila Imili Membre du bureau national de “Jossour”
“Les échanges d’idées avec ces femmes analphabètes m’a permis de connaître de plus près leurs souffrances et leurs besoins” : son expérience de cours d’alphabétisation dans les quartiers populaires de Rabat déclenche chez Leila Imili sa vocation de militante féministe. Elle a été monitrice au sein de l’Association Marocaine pour l’Education des Jeunes, elle a chanté les textes militants nationaux, de Marcel Khalifa et Cheikh Imam, au Maroc et à l’étranger au sein de l’association Erraid ; puis devient membre fondateur de Jossour, en juillet 1995, dont elle est actuellement membre du bureau national. Attachée d’administration au Parlement, elle assiste aux plénières et aux commissions et mesure de près “la révolution socioculturelle engendrée par les profonds changements apportés à la Moudawana, qui donne à la femme le droit à une citoyenneté complète”. La parité est son prochain combat : “en tant que fonctionnaire au Parlement, je suis soulagée de voir 35 parlementaires femmes au lieu de deux !”.

Latifa Jbabdi Présidente de l’UAF
Membre fondateur de l’UAF (1983), du comité de suivi pour la mise en œuvre des droits des femmes (1994), du comité démocratique de coordination féminine (1996), de l’AMDH, membre du CCDH et de l’instance Equité et Réconciliation, coordinatrice de la marche mondiale des femmes pour le Maroc et le monde arabe, Latifa Jbabdi a été nommée en 1998 Ambassadeur de la société civile auprès de la commission des Nations Unies pour les droits de l’Homme. Elle est à l’origine de la pétition de 1 Million de signatures qui a amené le Roi Hassan II à réviser la condition de la femme en 1993. L’annonce du nouveau code de la famille lui a redonné espoir : “Il constitue un tournant décisif dans l’histoire politique contemporaine du Maroc”.

Hassania Kabbaj Présidente de l’association “Al Mouwatina”
Son intérêt pour le travail associatif s’est déclenché grâce à son environnement familial. Hassania a entamé ses premiers pas comme volontaire dans des associations éducatives. Cette native de Tanger a essayé de combler le vide associatif de sa région en créant son association “Al Mouwatina” (La citoyenne) pour coordonner entre les différentes associations sur le plan national et régional. En menant des campagnes de sensibilisation, avec ses moyens associatifs, pour mieux expliquer le nouveau Code de la Famille, Hassania espère sensibiliser l’opinion publique sur les problèmes de la femme pour lutter contre sa marginalisation. Cette vraie militante qui bataille dur dans la région du nord du pays n’a qu’un objectif en tête : l’applicabilité du texte. Seule la rigueur issue des différents tribunaux de famille fera la différence. Cette femme de réseaux est l’une de celles que le Nord peut considérer comme incontournables.

Nouzha Lamrani Membre fondatrice de l’ADFM
Coordinatrice du Groupe de Recherche et d’Etudes sur Genre et Développement à la Faculté, elle est la “madame genre” du Maroc. C’est elle qui a impulsé ce concept à l’université. Concept qui depuis fait son chemin. Marquée par la discrimination entre les sexes dès l’âge de 11 ans, elle s’engage dans le militantisme dès les années 70-80 avec des séries de porte-à-porte pour parler aux femmes. Nouzha Lamrani a mis sa rigueur de professeure d’économie au service de multiples enquêtes sur les discriminations. Une base de travail évidente pour l’approche genre dont elle prend la défense la plus ardente.

Souad Lemsellem Secrétaire à l’UAF
C’est avec une conscience aiguë de son travail, une conviction profonde, et une disponibilité naturelle qu’elle ouvre la porte de son bureau : A 18 h, malgré les plaintes quotidiennes et nombreuses, l’énergie incroyable déployée pour écouter et soutenir les hommes -moins nombreux- battus par leurs femmes (!), Souad continue d’afficher un sourire. “C’est très dur, mais je suis convaincue par la cause des femmes” : ainsi justifie-t-elle sa présence infaillible au bureau de l’UAF à Rabat, où elle est secrétaire, coordinatrice du programme de l’éducation non-formelle et chargée d’écoute au centre SOS Annajda.
Le travail d’information sur les activités de l’UAF et de sensibilisation sur le contenu du nouveau code sont les priorités du moment et sa responsabilité quotidienne.

Zhor El Hor Membre de la Commission Consultative Royale
Un parcours impressionnant pour Zhor El Hor, membre de la Commission Consultative et Présidente du Tribunal Première Instance de Derb Soltane de la capitale économique. La militante peut se vanter d’avoir participé à plusieurs causes qui préoccupent la femme, durant son passage en tant que Directrice de Rédaction d’une revue juridique, sa nomination en 1979 en tant que première femme juge au tribunal d’El Jadida, à travers ses nombreuses recherches publiées ou encore sa participation aux conférences à l’échelle nationale et internationale. Celle qui a commencé sa lutte pour l’égalité et la justice se rappelle avec amertume les cas de femmes (divorcées, mères, femmes) qui se battaient dans les tribunaux pour avoir une part de leurs droits. Même si son meilleur souvenir reste le jour du discours royal sur le nouveau code de famille, Zhor est consciente que le prochain combat portera essentiellement sur la formation des femmes pour les faire sortir du ghetto de la pauvreté et de l’analphabétisme. Pour leur faire prendre conscience de leurs droits.

Zohra Lhioui Présidente de “Jossour” section Meknès
Entre l’enseignement et la recherche universitaire, Zohra Lhioui trouve le temps et l’énergie pour rendre justice aux femmes, ainsi que leur liberté et leur dignité, dans le cadre du groupe de recherche Tanit (de l’université May Ismail, Meknès), à travers le bureau national de Jossour (dont elle est membre), et la section de Meknès qu’elle préside.
Dans un contexte où les femmes sont les éternelles victimes d’“un système qui reste sourd à leurs doléances”, et encouragée par les témoignages de reconnaissance envers les acteurs de la société civile, Zohra voit en l’“Associatif féminin” un cheval de bataille, légitime et indispensable.
Le discours du 10 Octobre 2003 ouvre d’après elle “les perspectives d’une mutation sociale qui se heurte encore à des mentalités sexistes et sclérosées”. La bonne application de ce nouveau code, ainsi que le contrôle et la dénonciation des abus doivent être menés avec vigilance ; mais le combat majeur de la rue à ses proches, en passant par les bancs de la Faculté reste selon elle l’éducation à la citoyenneté.

Aïcha Lakhmass Directrice du centre “Annajda” de Casablanca.
Directrice du journal “8 mars” de 1983 à 1995, Aïcha Lakhmass a été le témoin et l’actrice privilégiée de la grande période du féminisme marocain. Présente lors de la fameuse réunion d’un samedi après-midi de janvier 1992 qui a décidé du lancement de la campagne d’un million de signatures, elle a fait partie de celles qui ont impulsé ce déclic donnant aux revendications du mouvement féminin un écho sans précédent. Le 10 octobre, “je me suis dit que notre militantisme s’était enfin concrétisé et que tous les efforts déployés pour la cause féminine étaient enfin récompensés”. Satisfaite de la nouvelle condition de la femme, une citoyenne à part entière, elle tient à préciser que celle-ci a désormais des droits mais également des obligations. “Il y a encore beaucoup de chantiers, mais le plus important est celui d’une bonne application du Code.”
Assia Lmrabet Coordinatrice au Centre “Assaida Al Hourra”
Assia a travaillé de façon acharnée pour coordonner avec les différentes associations leur intégration au “Printemps de l’Egalité” au niveau national en ayant à l’esprit une seule cause à défendre : la problématique de la femme. Cette jeune professeure a fait ses preuves dans le domaine associatif : formatrice dans des centres, participation dans des programmes pour la lutte contre l’analphabétisme et autres secteurs. A présent, après l’adoption du nouveau code, Assia prépare déjà avec un grand enthousiasme des programmes pour inclure la femme dans le politique, des campagnes de sensibilisation pour améliorer la condition de la femme rurale, ingrédients pour une citoyenne complète.

Fatéma Lmrabet Présidente de l’association “La Chabiba Nissaiya”
Lauréate de l’Institut Royal pour la formation des cadres, Fatéma a choisi son créneau : le travail associatif et en particulier l’animation culturelle pour davantage de proximité avec les classes sociales les plus ciblées. Après sa publication d’une recherche sur la participation politique de la femme dans les élections législatives de 2002, Fatéma a été élue pour présider l’association en question et occupe par la même occasion le poste de secrétaire général au bureau exécutif dans l’un des partis politiques réputés. Elle est convaincue que le travail associatif complète la lutte pour les droits de la femme. Se penchant sur les dossiers de l’analphabétisme, la scolarisation des petites filles, la lutte contre la pauvreté, Fatéma considère le nouveau Code de famille comme une douce révolte dans la société marocaine et un couronnement d’un long combat.

Zineb Miadi Membre fondatrice de l’OMDH
Militante “de nature” précise-t-elle, Zineb Miadi a toujours été contre toute forme d’injustice. Ses études en sociologie et philosophie “ont parachevé les grands principes qui doivent guider le monde et les comportements humains : l’égalité, la justice et l’équité”. Dès 1981, elle mène une étude sur les dossiers de tribunaux concernant les litiges entre époux afin de mesurer la relation entre la famille réelle et la famille à travers l’ancien code du statut personnel. Dès lors, elle constate le fossé : “J’ai découvert que ce code représentait le comble de l’injustice et qu’il était incapable de protéger la famille”. Reste “l’enracinement des valeurs de l’égalité dans les mentalités des hommes et des femmes ainsi que le suivi de l’application à la lettre du nouveau code”. Nul doute que la période sera propice au regard aigu de cette professeure en sociologie à la Fac de Ben M’Sik.

Amina Lemrini Membre fondatrice et ancienne présidente de l’ADFM
Avec des mots concis et clairs, et une grande lucidité, Amina Lemrini analyse l’état de notre société et le statut de la femme marocaine. Inspectrice principale de l’enseignement. Membre fondatrice et ancienne présidente de l’ADFM, Amina relie pour ainsi dire toutes les questions socio-économiques et culturelles à la problématique majeure de l’éducation. Avec un réalisme optimiste, “le 10 octobre 2003 est pour elle ce que ressent un esclave qui entame un processus d’affranchissement…”. Il s’agit maintenant, dit-elle, avec un effort ininterrompu, de tirer encore vers le haut une société qui vit de profonds changements : en donnant du sens aux dernières réformes, et en engageant une politique publique claire, cohérente et volontariste, avec un mécanisme fort pour veiller à sa mise en œuvre. Mais elle insiste avec une pertinence irréfutable, sur le rôle premier de l’école dans la promotion d’une culture de l’égalité.

Fatéma Mouhajir Cadre supérieur au Secrétariat d’Etat chargé de l’alphabétisation
Après de nombreuses études sur le statut de la femme dans le bassin euro-méditérranéen et dans les pays arabo-musulmans, Fatéma Mouhajir reste perplexe devant les résultats de sa thèse de recherche en Anthropologie sociale (EHESS, Paris), qui l’a menée trois années sur le terrain : “la résistance aux pouvoirs et aux changements, étude comparée de trois formes de comportements féminins en pays arabo-musulmans (Maroc, Palestine, Algérie)”.
De son avis de chercheuse, la question de la femme, de la dynamique interne du mouvement féministe, et de la construction de son identité, est résolument complexe.
Actuellement cadre supérieur au Secrétariat d’Etat chargé de l’alphabétisation, elle s’exprime librement sur sa féminité et sa maternité. Son combat pour l’avenir : “permettre à la femme de jouir de ses droits sociaux et culturels, afin que puisse naître un individu-femme, doté d’une pensée, d’une volonté et d’une liberté d’action”.

Zakia Mrini Présidente de l’association “Ennakhil”
Elle fonde et préside en 1997, l’association Ennakhil pour la femme et l’enfant, puis le centre d’écoute “Hawwaa” en 1999, dans la continuité, pour défendre leurs droits dans la région de Tensift. Pour Zakia, l’accès de la femme au statut de citoyenne responsable fait partie d’un processus global de démocratisation.
Maintenant que les droits fondamentaux sont acquis pour celle-ci, il s’agit de s’attaquer avec méthode au grand chantier de l’éducation, en prenant des mesures telles que : l’instauration d’une politique d’éducation générale basée sur l’égalité entre les sexes, la lutte contre la pauvreté des femmes, la programmation dans l’ensemble des associations de stratégies de vulgarisation sur le nouveau code, et enfin la formation de “femmes leaders” qui soient le relais entre l’Etat et la population.

Malika Naciri Militante politique
Militante dans l’âme, elle a démissionné de son poste au comité féminin du FFD à la veille des élections Législatives pour protester contre la façon dont la liste nationale a été établie. Sans concessions, elle s’est recentrée sur son terrain professionnel puisqu’en tant que médecin, elle côtoie l’injustice au quotidien. Considérant son expérience politique comme édifiante et désastreuse, elle fustige l’exploitation du mot “démocratie” au sein des partis politiques. Reste son engagement sur la question de la femme… Elle a vécu le 10 octobre comme “une barrière érigée au nom de l’Islam qui tombe” mais il faudra se concentrer sur l’application du nouveau Code de la Famille. Un souci de taille pour tout le mouvement féminin dans son ensemble.

Soumaya Naâmane Guessous Sociologue
Elle est professeure universitaire, experte consultante en sociologie et écrivain. Interpellée par l’atteinte à la dignité des femmes “au nom d’une religion mal comprise, tournée principalement vers l’exploitation et l’oppression des femmes”, elle témoigne par ses écrits de la souffrance des mères célibataires, des victimes d’inceste, d’agression sexuelle et de la réalité féminine d’une manière générale au Maroc. Après le soulagement et la joie du 10 octobre, elle perçoit le Maroc comme “un grand chantier où les militants doivent s’investir pour que les directives royales soient respectées.” Pour elle, il faut lutter pour une généralisation de la scolarisation qui devrait être obligatoire jusqu’à seize ans. L’avortement pour les filles victimes d’agressions sexuelles et d’inceste reste son principal cheval de bataille.

Najat M’jid Présidente de Bayti
Membre du CCDH, administrateur de la Fondation Mohammed VI, pédiatre et médecin directeur de la polyclinique mère-enfant de la CNSS Hay Hassani à Casablanca, experte pour l’Union Européenne, pour les Nations Unis, consultante pour l’Unicef… Najat M’Jid pourrait presque être qualifié de “speedy woman”. Elle est sur tous les terrains. C’est en travaillant dans le domaine de la promotion et de la mise en œuvre des droits de l’Enfant, qu’elle a été amenée à revoir obligatoirement le statut de la fille et de la femme. Son meilleur souvenir de militante est sans conteste “le fait que mes deux filles luttent pour les mêmes valeurs : ne pas accepter l’injustice et l’atteinte à la dignité, et tout faire pour contribuer à l’instauration d’un véritable Etat de Droits quel qu’en soit le prix personnel à payer”. Le discours du Roi lui a procuré une grande joie, “mais, il faut veiller à la bonne application des lois et élaborer des indicateurs de suivi”. En ce qui la concerne, elle continuera son combat sans “jamais m’inscrire dans la sinistrose”.

Hakima Naji Membre de l’association “Assaida Al Horra”
Le 23 mars 1981 à Rabat, l’UNEM et la Gauche marocaine sont liquidées ; Hakima Naji, alors étudiante en biologie-Géologie est arrêtée. À sa sortie de prison, un an plus tard, elle contribue en 1983 à l’édification de la section féminine au sein de l’OADP. Son profil politique la contraint d’émigrer dans le Nord, où elle défend le militantisme régional comme seul levier de la décentralisation, en créant le comité du journal 8 Mars en 1987, et la section de l’UAF en 1992.
Le combat du mouvement féminin ne doit pas se limiter d’après elle à sa dimension juridique, les responsables politiques doivent traiter le statut de la femme dans ses dimensions socio-économique et culturelle également. A propos de “la pratique féministe au Maroc”, Hakima s’inquiète des lacunes théoriques et de l’absence d’une pensée ou plusieurs, qui permettent d’y voir plus clair, d’éviter les erreurs du passé et d’élaborer des stratégies efficaces. Il est impératif de “rendre visibles les hommes et les femmes en faveur du droit de la femme dans notre civilisation, afin de se réapproprier collectivement ce legs confisqué depuis des siècles”.

Naïma Oulmeki Coordinatrice de l’association Jossour (Rabat)
Derrière le calme, la tempête! Naïma Oulmeki ne mâche pas ses mots quand elle parle de la condition féminine. Professeure et chercheur à L’institut archéologique de Rabat et coordinatrice à l’Association “Jossour” au bureau de Rabat, la jeune femme son propre credo : l’expression artistique pour aider à véhiculer des messages instructifs. Son travail sur la mise en scène d’une pièce de théâtre “histoires de femmes” qui relate le sens du Plan National est jouée en 38 représentations. Cette pièce demeure son exemple le plus vivant pour expliquer la politique de proximité qu’elle préconise afin de rendre accessibles les textes les plus ardus, et ce, en prenant en considération le taux flagrant de l’analphabétisme parmi les femmes marocaines, et surtout en zones rurales.

Fouzia Rhissassi Fondatrice du Groupe Universitaire d’Etudes Féminines
Fouzia Rhissassi a été membre de la commission sur l’intégration de la femme au développement auprès de Mohamed Saïd Saadi en 1998-1999, et s’occupe aujourd’hui du réseau NetRac, dont elle est présidente depuis le 29 avril 2002 (Network Recherche Action Civique). Cette ex-doyenne de la faculté de lettres et sciences humaines de Kénitra (1998-2003) a déclenché
en matière de formation et de recherche universitaire une dynamique novatrice et interculturelle, convaincue que les études féminines sont le “bras académique” des mouvements socioculturels. Avec cet objectif, elle fonde et coordonne le Groupe Universitaire d’Etudes Féminines (GUEF) entre 1993 et 2003, et fait accréditer l’UFR “Etudes féminines”, qu’elle dirige entre 1998 et 2003 à l’Université de Rabat-Agdal. Pour cette militante universitaire et porte-parole de “la
question féminine” auprès des organismes internationaux, le discours du 10 octobre 2003 est l’occasion de faire le point. Quant au mouvement féministe marocain : “il est pluriel ; mais sous cette diversité, relative aux besoins et aux problèmes spécifiques des femmes, ainsi qu’au contexte socio-temporel, le noyau dur du féminisme, c’est cette lutte irréductible contre toutes les structures de subordination des femmes”.
Elle met en garde contre la menace intégriste : “Le discours doit mettre à nu le comportement de tous les “talibans”, qui veulent cantonner toutes les femmes musulmanes derrière les voiles de l’ignorance et l’inégalité”.

Rabéa Naciri Présidente de l’ADFM-Rabat
Pendant plus de vingt ans, Rabéa Naciri a concilié vie professionnelle (professeur de géographie à l’Université de rabat) et vie associative. Actuellement, elle dirige un bureau d’études et de recherche sur le genre et le développement démocratique à Rabat. Le déclic du militantisme, elle ne s’en souvient même plus, “cela fait tellement longtemps. Je crois que c’est une histoire familiale, mon père était un homme égalitaire”. Le discours royal du 10 octobre a été selon l’un des meilleurs discours politiques qu’il lui a été donné d’entendre, cependant, “les différentes tentatives de récupération de cette victoire m’ont donné à réfléchir sur les meilleures façons de continuer”. En effet, selon Rabéa, il est indispensable de construire un réel mouvement des femmes au Maroc et d’impliquer les jeunes. “En tant que responsable de l’ADFM, j’en fais actuellement ma priorité : restructurer l’association et en faire un puissant outil de plaidoyer et de proposition pour le progrès des femmes et du Maroc tout entier ”.

Khadija Ryadi Responsable du secteur féminin à l’AMDH
En 2001, Khadija RYADI est nommée secrétaire générale de l’AMDH à Rabat, après avoir créé le comité des femmes ouvrières à l’UMT en 1990, et été membre du comité femme à l’UMT nationale en 1995.
Cette native de la région de Souss est très tôt heurtée par l’abandon du milieu rural par les pouvoirs publics, et la privation du droit à la scolarité chez les jeunes filles de ces régions.
Elle trouve sa place entre cette injustice locale et celle qui viole le droit des femmes du monde : “en tant que salariée, femme, gauchiste, amazigh et Africaine, j’ai presque tous les profils de victime d’injustice”. Quant aux combats locaux, du point de vue du droit, les directives du nouveau code sont une avancée certaine par rapport à l’ancienne Moudawana, sur la voie de la démocratisation notamment. Toutes les énergies seront à l’œuvre pour l’application du dit code avec une vigilance aigüe.

Khadija Rougany Membre de l’AMDF
Des cas d’injustice envers les femmes, Khadija Rougany en a connu beaucoup durant son parcours d’avocate. Elle n’oubliera jamais le cas de Fatna, une femme de 70 ans martyrisée et expulsée du foyer conjugal ou celui de Amal, assassinée par un homme qui la harcelait. Et c’est justement cette injustice à l’égard de la femme qui l’a amenée en 1993 à joindre les rangs de l’AMDF. Depuis, elle est de tous les combats : membre fondateur du Printemps de l’Egalité, militante pour les droits humains et les droits des femmes, chroniqueuse à Al Ahdat Al Maghribia… Le discours royal a été, selon elle, très audacieux, mais “il faut veiller à la bonne application de nouvelles lois afin qu’elles soient cohérentes avec la philosophie du projet basée sur l’égalité et le partenariat entre les deux époux”. Parallèlement, “je compte continuer ma lutte pour les droits humains et participer au développement et au renforcement du mouvement féminin pour qu’il devienne un mouvement de masse”.

Saadia Saadi Présidente de l’association féminine “Al Amal”
Le 8 mars 1981, Saadia Saadi regagne le Maroc avec sa famille, après des années d’exil à l’étranger : la journée de la femme célèbre pour elle, à la fois la femme et le retour ! L’histoire d’un père qu’elle décrit comme “paradoxal”, polygame et “Alem” de formation, et en même temps féministe d’avant-garde, encourageant ses filles à étudier, travailler et même militer, pourrait être un excellent argument pour le mouvement féministe : Et si les hommes n’attendaient que la résistance des femmes à la tradition et aux conventions pour changer ? Forte de son expérience de l’inégalité, Saadia Saadi sait que le rapport de force est le plus mauvais recours pour instaurer un rapport différent, plus respectueux. Maintenant que les fondements juridiques sont jetés entre les époux d’une même famille, il reste à poursuivre le combat. À travers l’Association “Amal” dont elle est l’actuelle présidente, elle contribue à l’ouvrage du mouvement féministe, et relève à sa manière les défis que nous devons relever en tant que peuple.

Rachida Saidi Vice-Présidente de l’UAF
Rachida Saidi a extrêmement conscience que la lutte contre la violence conjugale, l’analphabétisation et la discrimination de la femme au niveau professionnel sont les prochains combats à mener ainsi que le droit à l’interruption volontaire de la grossesse et la question de l’héritage. Si “les militantes juristes ont encore énormément à faire”, elle est aujourd’hui très fière que le Maroc soit l’un des rares pays arabes à promouvoir les droits de la femme.

Zoulikha Nasri Conseillère de SM le Roi
Au fil des années, Zoulikha Nasri est devenue le maestro de tout ce qui revêt un caractère social. Elle est la première dame à être nommée Conseiller du Roi, elle est également membre du conseil d’administration de la fondation Mohammed V. C’est en 1997, que sa carrière politique commence, elle est alors nommée Secrétaire d’Etat à l’Entraide Nationale. Discrète, elle a su rester loin des regards curieux des caméras, mais la première semaine de solidarité contre la pauvreté en 1997 la mettra sur le devant de la scène. La question de la femme lui a également toujours tenu à cœur. Le jour même du discours du Roi, le 10 octobre, elle a rassemblé toutes les femmes du mouvement féminin pour fêter ensemble “cette nouvelle étape historique et décisive pour le Maroc qui s’inscrit dans un processus de consolidation et de consécration des droits de la femme marocaine”. Selon elle, ce projet consiste à enrichir le fikh marocain afin qu’il puisse accompagner les changements de l’époque et instaurer le principe d’équité entre les deux sexes.

Jamila Sayouri Membre du bureau national de la Fédération Nationale d’Appui de la Réforme et des Initiatives Locales (FNARIL)
Elle a été la première avocate à avoir travaillé au centre d’écoute ANNAJDA (1996-2000) : son meilleur souvenir de militante ! Avocate au barreau de Rabat, Jamila Sayouri a également été membre fondateur de l’UAF, et du PSD dont elle a coordonné la section féminine en 2000. Son interprétation juridique du nouveau code est claire : “Dans le contexte des droits de l’homme, le nouveau code articule le principe d’égalité comme référence pour traiter des relations familiales ; d’autre part, il permet l’application de conventions internationales sur le droit des femmes (CEDAW) et de l’enfant. Au plan politique, il soumet la Moudawana aux propositions de changements devant les deux chambres, et brise ainsi définitivement son caractère religieux et sacré. Sur le plan culturel enfin, il donne à l’acte de mariage un sens plus riche et plus noble qu’une simple relation sexuelle, et substitue à la soumission la notion de responsabilité conjugale, et supprime une fois pour toutes la Kiwama, ou tutelle”. Son enthousiasme est communicatif : “A force de les appliquer, ces nouvelles dispositions vont influencer la culture populaire régnante, dissoudre celles qui différenciaient l’homme et la femme.”

Souad Samaoui Membre fondatrice de l’Association “Amal”
Souad Samaoui a entamé son combat depuis 1982 au sein du Journal “8 Mars” précurseur dans la problématique de la condition de la femme au Maroc. Souad qui occupe le poste de Chef de service à la Direction régionale de la planification de Casablanca, est restée fidèle à ses principes jusqu’à la naissance de l’association où elle prend à cœur les conditions de la petite fille bonne et assiste les femmes bénéficiaires des micro-crédits à gérer leurs petites entreprises.

Fadéla Sebti Avocate
Avocate au barreau de Casablanca depuis 1983, Fadéla Sebti est l’auteur du répertoire de la législation marocaine, “Et vivre musulmane au Maroc”, et travaille également, en collaboration avec SYGEDOC, à la conception d’une banque de données juridiques constituées de l’ensemble de la législation et de la jurisprudence en vigueur, pour la cour suprême.
C’est avec une fermeté inflexible qu’elle résiste et lutte pour l’abrogation des lois injustes, animée par l’expérience d’humiliations personnelles ou vécues par d’autres femmes, mais aussi par les réflexions positives, les confrontations parfois houleuses entre militantes, qui restent de grands moments de communion.
Fadéla Sebti éprouve de la gratitude à l’égard de Sa Majesté, lorsqu’il “s’interroge sur le devenir d’une société amputée de la moitié de sa composante -à savoir les femmes”, et qu’il considère désormais “la question féminine, non plus comme un problème accessoire, mais comme un facteur essentiel à l’évolution d’une société.” Mais si elle reconnaît que le nouveau Code représente une avancée incontestable en matière de droits de l’enfant, elle déplore la persistance de la tutelle légale : “Je constate que l’épouse et la femme divorcée restent juridiquement inférieures au mari et au père”, répond-elle.
En effet, le père est le tuteur légal et légitime, d’après l’article 236, sauf s’il est démis par décision de justice, et a le droit d’interdire, en cas de divorce, à une mère qui a la garde de l’enfant, le droit de voyager sans le consentement du tuteur légal, article 179.
L’heure n’est pas encore à la responsabilité juridique partagée, et à l’autorité parentale : Il nous reste du chemin à parcourir !

Mériem Othmani Présidente de l’Institution Nationale de la Solidarité Avec les Femmes en détresse.
Chef d’entreprise dans le secteur privé -elle a monté Sicopa en 1971-, Mériem Othmani décide de s’impliquer dans la vie associative dès 1980 en tant que présidente déléguée à “l’Heure Joyeuse”. Une vraie pionnière de la société civile, donc, qui décide de mettre son expérience dans la fondation d’INSAF en 1999, mue par “Les sentiments d’injustice, d’humiliation et d’impuissance devant des textes moyenâgeux qui régissaient notre vie et semblaient intouchables”. Les prochains combats pour la défense des femmes ne peuvent être que multiples et celui de la présidente d’INSAF est encore plus ciblé : “il faudra protéger nos enfants en luttant contre le travail des enfants et tout particulièrement défendre les petites filles qui, à partir de 5 ans, sont exploitées et souvent deviennent, après avoir été abusées, des mères célibataires ou des prostituées”. CQFD pour un tel esprit de synthèse !

Fatna Sarehane Professeur de l’enseignement supérieur à la faculté de droit de Casablanca
“Quoi de plus injuste que d’avoir l’impression que le Maroc méprise ses femmes en ignorant leurs compétences !” Fatna Serhane a toujours été choquée par l’exclusion systématique du potentiel féminin de la vie publique. Docteur en droit de l’Université de Paris II, spécialiste du droit international privé et du droit de la famille, elle est également membre fondateur de l’Organisation Marocaine des Droits Humains. Son meilleur souvenir reste l’entrée des femmes au Parlement. Suite au discours royal du 10 octobre, elle est d’avis qu’un travail de proximité s’impose auprès des Marocains pour une meilleure compréhension du nouveau code de la famille. Un petit clin d’oeil de la rédaction s’impose, ici, pour notre collaboratrice du “courrier droit” depuis plus de six années. Chaque mois, Fatna s’occupe des interrogations de nos lectrices. Un vrai métronome.

Nouzha Skalli Présidente du groupe parlementaire de l’Alliance Socialiste à la Chambre des Représentants.
Membre fondateur de L’ADFM, de l’OMDH, du comité national pour la participation des femmes à la vie politique, du Centre d’écoute et d’assistance juridique aux femmes victimes de violence, Nouzha Skalli fait partie de celles qui mènent le combat pour l’égalité depuis plus de vingt ans. C’est sur le terrain qu’elle a découvert l’ampleur des injustices subies par les femmes, “des histoires qui crevaient les yeux, mais qu’on n’a pas voulu voir”, dit-elle. La réforme de la Moudawana a été sans aucun doute un grand moment de joie, “mais il reste encore des axes sur lesquels il faut travailler : les droits économiques, sociaux et culturels des femmes, une bataille idéologique pour combattre ceux qui poussent les femmes à intérioriser leur infériorité et étouffer leur féminité, et enfin l’engagement massif des femmes dans la bataille politique ”.

Touria Tajeddine Membre de l’Union de l’Action Féminine
À Tanger, Touria est trop souvent confrontée aux injustices envers les femmes des plus basses classes sociales. Les cas douloureux, elle connaît : “Un cas d’injustice liée au code de la famille m’a particulièrement marquée. Il concerne une vieille paysanne répudiée à l’âge de 70 ans, chassée du lopin de terre qu’elle n’a jamais quitté, et décédée peu après”. Après le 10 octobre, elle se réjouit de la dimension civique et de la portée pédagogique du nouveau code de la famille, même si certains amendements ne vont pas assez loin à son goût. Elle œuvre maintenant à sensibiliser les jeunes aux changements obtenus et à les impliquer dans leur mise en œuvre. Un prochain combat ? “Responsabiliser et impliquer les femmes dans la sphère politique qui se traduit par une présence féminine occasionnelle plutôt qu’institutionnelle, dans un climat conçu et vécu au masculin”.

Rachida TAHRI Présidente Nationale de l’ADFM
Inspectrice en orientation scolaire, membre fondateur du centre d’écoute pour femmes victimes de violence à Casablanca, Rachida Tahri, comme toutes les femmes de sa génération, s’est inscrite dans la lutte contre les injustices et les inégalités sociales. En 1976, elle a intégré le PPS et en 1985, elle crée avec d’autres membres l’ADFM/Casa. Le 10 octobre restera une journée gravée dans sa mémoire. “Durant les 30 dernières années, de grands acquis ont été arrachés ; en regardant vers l’horizon, la marche vers l’égalité est encore longue, mais il y a l’espoir qui nous guide”.

Najat Errazi Présidente de L’Association Marocaine des Droits de la Femme
Diplômée en sociologie et en philosophie, elle choisit très tôt de lutter pour le respect des droits de la femme. Ainsi, dans les années 80, elle contribue à la création de clubs d’alphabétisation pour les jeunes femmes. En 1992 et 1993, elle devient membre du conseil national pour le changement de la Moudawana en parallèle de son travail au sein de l’Association Marocaine des Droits de la Femme dont elle est l’une des fondatrices. Son travail de militantisme la pousse à devenir Présidente de l’AMDF de 1993 à 1997 et membre fondateur du centre d’écoute l’Hermitage pour les femmes victimes d’agressions. “La philosophie contenue dans le discours royal du 10 octobre constitue un pas de géant dans notre réflexion sur la législation”, dit-elle ; mais cela ne signifie pas que le combat est terminé ; elle insiste sur le fait que les violations des droits des femmes doivent continuer à préoccuper toutes les associations de femmes. Son meilleur souvenir de militante est sa participation à un sit-in spontané de Marocaines qui, en plein New York en juin 2000, ont protesté contre les lois discriminatoires à l’encontre des femmes.

Houria Tazi Sadeq Avocate spécialisée dans les affaires matrimoniales
Le combat de Houria Tazi n’est pas lié à une cause unique mais dû à la situation de la démocratie, au droit au développement au Maroc et à la relation aux institutions en général. “Les cas d’injustice qui m’ont bouleversée sont nombreux : les enfants de couple mixte qui n’ont pas la nationalité, les femmes qui tombent dans la pauvreté à cause d’un divorce, la violence morale exercée à l’encontre des femmes qui reste difficile à prouver…”.
Le 10 octobre a été pour elle un soulagement et une reconnaissance à l’égard de toutes les forces vives du pays qui ont contribué à ce changement, “mais la tâche n’est pas terminée. Il faut encore changer les mentalités et les comportements, ajuster l’application à l’esprit du texte, informer les justiciables sur la réalité des changements”.

Nabila TBEUR Directrice de l’INSAF
À trente ans tout ronds, la jeune docteur d’Etat en chimie représente la relève de la société civile. Discrète et bosseuse, elle s’est engagée dans le combat des mères célibataires via l’Insaf. Scandalisée par la souffrance d’une femme dont le mari refusait absolument le souhait de divorce, elle a décrété qu’il ne pouvait y avoir de vie digne sans engagement. Elle est portée par “les remerciements des mamans célibataires, pour les avoir aidées à garder leurs bébés, pour leur avoir permis de reconquérir leur dignité et de retrouver leur joie de vivre”. Après la réforme de la Moudawana, l’heure est à l’investissement politique et social de la nouvelle génération : “L’exploitation des petites filles domestiques maltraitées et privées de scolarisation est le plus grand chantier à venir de la décennie”.

Zineb Touimi Benjelloun Conseillère du fonds de développement des Nations Unies pour la femme (UNIFEM) pour l’Afrique du Nord.
D’entrée, elle précise : “Je ne suis pas à proprement parler militante. Je ne sais pas s’il serait judicieux de m’inscrire dans votre liste”. Lorsqu’on lui rétorque que sa fonction professionnelle a fait d’elle le point névralgique de la guerre, elle s’incline en éclatant de rire. Sa fonction de conseillère du fonds de développement aux Nations Unies lui a permis d’apprécier “la professionnalisation du mouvement des femmes durant ces dix dernières années”. Et si le 10 octobre lui a reboosté le moral : “Ouf, un obstacle au développement du pays est franchi, on peut enfin passer à autre chose”, elle n’en reste pas moins vigilante sur le prochain combat à mener : “L’application effective de la réforme à travers une approche globale et coordonnée. La réforme a libéré beaucoup d’énergies et ouvre un chantier encore plus large.”

Naïma Zarfi Coordinatrice de l’Association de Développement Local de Chefchaouen (ADL)
Depuis son enfance, l’inégalité entre les sexes a toujours été un obstacle à sa compréhension de la société : Pourquoi les droits humains ont-ils jusque-là privilégié nos hommes ? Actuellement coordinatrice de l’ADL à Chefchaouen, elle milite pour que l’homme et la femme soient partenaires dans le processus de démocratisation, et pour concrétiser les récents acquis en faveur de la femme et des enfants. Comme beaucoup d’autres femmes divorcées, qui vivent la même épreuve, Naïma nous livre son combat personnel : “Ce sera la lutte pour retrouver la garde de mon fils et lui apprendre le respect des autres êtres vivants, qu’ils soient homme, femme, animaux ou végétaux !”

Leïla Rhiwi Co-coordinatrice du Printemps de l’Egalité
Militer pour la condition de la femme est un combat continuel pour Leïla Rhiwi. Et c’est en s’acharnant contre les iniquités qui frappent les femmes que cette militante, membre de l’ADFM, a pu se démarquer. Elle se souvient encore de 1992 lorsque Hassan II a identifié les injustices commises à l’égard des femmes : “C’était un moment de joie pour toutes les femmes qui se battaient pour plus de justice. C’était une grande victoire “. Le 10 octobre a été, selon elle, un grand moment de bonheur et de fierté : “Avec ce code nous franchissons un pas vers la consécration des droits des femmes. Le chemin est encore long, mais nous pouvons, aujourd’hui lorsque nous regardons en arrière, mesurer le degré du progrès atteint.”

Habiba Zahi Détachée syndicale auprès de la Confédération Démocratique du Travail (CDT)
En 1982, arrêtée en raison de son militantisme marxiste, elle partage sa cellule de droit commun avec une jeune femme âgée de 17 ans, domestique violée, et son nouveau né qui hurle de faim. “C’est la pire des injustices. Et elle continue sous diverses facettes. Il n’y a pas assez de centres d’accueil pour les femmes en détresse”. Cette syndicaliste de la CDT, militante d’extrême-gauche est fortement impliquée dans le mouvement féminin. Lorsque la CDT a réservé plus de 20% des sièges du Bureau Exécutif aux femmes, “ce fut un réel bonheur”. À ses yeux, l’avenir du mouvement féministe doit zoomer davantage sur d’autres volets, notamment le volet social et économique car “une femme sans revenus suffisants risque bien de laisser passer la possibilité qui lui est permise par le code de la famille de demander le divorce”.

Zahra Zaoui Présidente de l’association “Oujda Ain Ghazal 2000”
Le 24 avril 2000, elle fonde et préside l’association “Oujda Ain Ghazal 2000” de développement local, pour développer la région de l’Oriental. Avocate depuis mai 1988

Source: http://robocup555.blogs.nouvelobs.com/archive/2009/09/22/les-100-femmes-qui-font-bouger-le-maroc.html

 

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