Ramsès II en route pour l’éternité

« L’éternité, c’est long, surtout vers la fin ». Le mot est attribué à Jean Dutourd mais on l’imagine davantage dans la bouche d’un pharaon que dans celle d’un académicien. Car s’il est vrai que les deux sont voués à l’immortalité, l’un l’est plus que l’autre. Prenez le plus connu d’entre eux, le pharaon par excellence, Ramsès II dit “le bâtisseur”, troisième pharaon de la XIXème dynastie, fils de Séthi 1er, aimé d’Amon, élu de Rê, Seigneur des Deux Terres, mort à 80 ans recru de jours douze siècles avant l’ère chrétienne. Il est toujours là, pimpant ou quasi. Un nom et une ombre, éléments immatériels indispensables au défunt le jour de sa présentation devant le tribunal divin. Evitons les anachronismes et ne parlons pas de « momie », terme moderne dérivé de l’arabe mumiya (bitume pour embaumer les morts). Robert Solé nous y invite dans La vie éternelle de Ramsès II (185 pages, 17,50 euros, Seuil), un récit original sur un thème rebattu qui n’a cessé d’exciter l’imagination et les phantasmes des lecteurs, surtout en France (l’Egypte ancienne et l’œuvre de Stefan Zweig sont deux passions françaises qu’il faudra bien un jour élucider). Ce n’est pas du Pierre Loti, celui de La Mort de Philae (1907), roman fantastique qui nous entraîne à errer dans une ronde de nuit parmi les momies royales. C’est mieux car cela oscille en permanence entre le vrai et l’invraisemblable; et c’est tellement bien amené que l’on finit par se convaincre du bien-fondé de ce que Ramsès entendit durant toute son éducation : « Ce n’est pas parce que tu es mort que tu es mort ».

Pierre Assouline

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