La mort du peintre Jorge Camacho, surréaliste et cubain

Le cubain Jorge Camacho, mort à Paris le mercredi 30 mars, était une des ultimes « découvertes » picturales d’André Breton. L’édition 1965 de son ouvrage Le Surréalisme et la Peinture (Gallimard), publiée un an avant la mort de l’écrivain, compte parmi ses tout derniers ajouts le texte « Brousse au-devant de Camacho ».

camacho.1301576060.gifNé à La Havane le 5 janvier 1934, Jorge Camacho s’installe à Paris en 1959 et prend contact avec le sculpteur cubain Agustin Cardenas, fort apprécié par Breton.

Peintre, dessinateur, graveur, poète parfois, plus tard photographe, Camacho s’intègre au groupe surréaliste, participe à ses expositions, collabore à de nombreux ouvrages.

Les figures et les couleurs de Camacho lui sont personnels, d’autant que ses principales influences proviennent d’autres univers, comme l’alchimie, l’occultisme, la littérature (Raymond Roussel, Sade, Bataille, Panizza).

Son bestiaire ne rassemble à aucun autre, même si Bosch pourrait être invoqué. Les pattes d’insectes, les ossements et les becs d’oiseaux prolifèrent mais s’incarnent sous des formes que la nature n’imite pas. Il y a aussi un climat énigmatique, oppressant, aux architectures ésotériques, aux lignes fuyantes n’ayant qu’un lointain rapport avec De Chirico. Les couleurs pastel coexistent avec une palette sombre.

Au temps où les surréalistes se réunissaient à la Promenade de Vénus, Camacho lui-même avait une belle tête d’oiseau, mâchant sa pipe avec un sérieux à toute épreuve, plutôt discret, mais ne refusant aucun jeu ou activité collective.

Lorsqu’il bavardait avec Vincent Bounoure, un de ses principaux interlocuteurs, on avait l’impression d’avoir aterri sur un nid d’aigles planant très au-dessus des mortels.

Chez lui, à Neuilly, auprès de sa compagne espagnole Margarita, le visage changeait comme si retrouver l’usage de la langue maternelle le déridait instantanément. Il était pourtant un lecteur infatigable, un érudit à force d’assimiler et de s’inspirer d’autres mondes imaginaires.

Le Monde

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