Claude Lévi-Strauss, Œuvres

1. L’idée de réduire d’un bon tiers les quelque 60 cm linéaires que constitue la part livresque de l’œuvre de Lévi-Strauss est a priori excellente. Rendre ainsi sa lecture plus accessible et plus commode, plus économique aussi, en bref publier, comme les Anglo-Saxons savent le faire, une sorte de portable Lévi-Strauss. Mais il a fallu que cela se fasse dans la prestigieuse collection de la Pléiade, en profitant de la célébration annoncée d’un centenaire. Disons d’emblée que si le choix de la collection dépouille ce projet d’édition compacte de son argument économique – le prix proposé n’étant pas à la portée de toutes les bourses étudiantes –, il change aussi considérablement l’esprit de la démarche. Il ne s’agit plus tant de faciliter l’accès à une œuvre que de la consacrer en précipitant l’entrée de son auteur au panthéon des Grands Auteurs de la littérature dont la fameuse collection en question serait, par la seule grâce de la marque Gallimard, devenue l’antichambre obligée. Dès lors, les enjeux se démultiplient à l’infini, devenant en partie des enjeux de pouvoir et on imagine volontiers les intenses tractations qui ont conduit à la désignation des artisans de cette édition, tractations menées entre vénérables institutions de la rive gauche : la rue Bodin, la rue d’Ulm, plus que jamais vivier de toutes les ambitions, et, enfin, la rue du Cardinal-Lemoine, plus modeste maison certes, mais quand même maison-mère du lévi-straussisme officiel. Sans oublier bien sûr la maison Plon, détentrice des droits originaux. Mais, finalement, c’est un livre que nous avons entre les mains et c’est celui-ci que nous feuilletons aujourd’hui.

Emmanuel Désveaux

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