Vox geographi Géographie des enfers gréco-romains

Dans notre langage courant, fortement imprégné de culture judéo-chrétienne, l’Enfer est le lieu des âmes damnées qui expient dans la fournaise, par opposition aux âmes élues du Paradis. Une distinction à la fois géographique, entre Enfer et Paradis, et morale, entre méchants et bons. Cette dichotomie oppose deux territoires, ceux des damnés et des élus, et non ceux des morts et des vivants.

Dans l’Antiquité gréco-romaine, les Enfers sont le lieu de tous les trépassés, bons ou mauvais, qui « passent » du monde des vivants à celui des morts. C’est une question de frontière entre la vie et la mort, d’interface entre deux mondes. Ces deux mondes sont donc inséparables : l’un ne peut être étudié sans l’autre, les Enfers font partie de la Terre entière.

Pour le géographe, la recherche implique d’ « aller sur le terrain ». Périlleux pour un mortel : « il est facile de descendre dans l’Averne (…), mais revenir sur ses pas (…) voilà qui est l’affaire et demande un effort », écrit Virgile dans l’Enéide (VI, 126). Le véritable terrain de recherche, plus accessible, est la bibliothèque. Car les Enfers sont un mythe et ne peuvent exister que par des récits, et leur géographie ne peut donc qu’être imaginaire.

Faire une géographie des Enfers, même imaginaire, implique d’en localiser les parcours, les limites et les territoires. Mais aussi de donner sens à une organisation de l’espace structurée à la fois par les connaissances scientifiques, les fins morales ou politiques et les narrations mythiques de l’Antiquité. Deux textes fondateurs du mythe des Enfers sont ici requis pour en faire une géographie : le Phédon de Platon et L’Enéide de Virgile.

Jean-Marc PINET

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