Kateb Yacine ou les batailles littéraires de la guerre anticoloniale

21 ans après le décès de cet écrivain qui «habitait l’échafaud, sa tête sous le bras»

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Kateb Yacine

Kateb Yacine n’a publié que deux romans, quelques pièces de théâtre et recueils de poésies (1). Sa notoriété, «inversement proportionnelle au volume de son œuvre» (2), tient aussi bien à son immense talent qu’à son engagement jamais démenti, dans le mouvement indépendantiste d’abord puis, après l’indépendance, dans le mouvement démocratique.
L’engagement imprègne l’ensemble de cette œuvre, où les thèmes politiques tiennent une place importante, sans pour autant la banaliser ou la transformer en une plate et triviale propagande. Les prises de conscience politique et poétique semblent toujours être allées de pair dans le parcours de l’auteur de Nedjma, et c’est là une magistrale démonstration de ce qu’appuyé à une esthétique véritable, l’engagement n’est pas un frein à la créativité.

Kateb Yacine est venu à la politique par la porte étroite des prisons coloniales lorsque jeune lycéen, il a été arrêté en mai 1945, lors d’une manifestation nationaliste. Une année plus tard, il faisait une entrée remarquée sur la scène littéraire, par la grande porte de la poésie, en publiant en 1946 Soliloques, qu’il fera suivre, en 1947, par Loin de Nedjma. Dans une première ébauche de l’œuvre qui suivra (3), les deux thèmes majeurs du premier recueil, en dépit de ses indéniables accents symbolistes, sont l’amour et la révolution. Dans le second fera sa première apparition Nedjma, future figure centrale de l’écriture katébienne.
Le jeune poète trouvera vite sa voie : peu lui importera d’écrire «aussi bien» que ses congénères francophones ou français, ce à quoi n’étaient pas complètement étrangères ses convictions indépendantistes précoces et son obsession de la redécouverte de l’identité première perdue. A l’imitation des géants français ou des aînés algériens, il préférera écrire librement, fougueusement, puisant aussi bien dans le réservoir lyrique universel que dans le trésor de la culture orale, qui, partout, affleure dans l’imaginaire littéraire algérien comme pour rappeler sa légitime existence.

Yassine Temlali

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