«Fragmentations de l’eau» de Moussa Harim

Le mal de l’absence

Les fantômes de ce poète, coulent comme de l’eau, goutte à goutte. Ils l’ont pris par la main, pour lui faire parcourir le passé et la mémoire, qui prennent sens avec le présent et ses lendemains incertains. De son pays, qu’il a quitté depuis plus de trente ans, exil forcé, pour s’installer en France, il lui reste des fragments, des fragments de mémoires. Parti sans autre bagage, à l’âge de vingt-huit ans, qu’une valise et un fantôme qu’il croyait avoir traînés sur ses pas. En exil, il s’est accommodé de l’absence, au fil du temps. C’est alors que la Libye, en feu et en sang, a éveillé l’absence, laquelle donnera la quintessence de quelques-uns de ses nouveaux poèmes, pour ainsi dire sa douleur et son impuissance, son angoisse et son espoir. Alors sa jeunesse d’hier se confond avec celle d’aujourd’hui en lutte, pour laquelle il exprime son impuissance d’apporter quelque chose, même si en réalité ce n’est pas le cas :

C’est ainsi que les jeunes meurent
sans rien sur eux et rien en eux.
Ils meurent vraiment
comme si les cœurs faisaient grève,
ils meurent en plein soleil
sans témoin
comme meurt la terre de soif,
comme meurent les arbres
debout.
Ils meurent de silence
comme se suicident les rochers.
Et moi ici je ne peux rien
sauf…
peut-être,
et encore…

Mohammed Yefsah

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